Catena Aurea 9907

vv. 7-10

9907 Lc 9,7-10

Eusèbe. Après avoir ceint et revêtu ses disciples, comme les soldats de Dieu, d'une puissance divine et des enseignements de la sagesse le Sauveu r les envoie vers les Juifs, comme des docteurs et des médecins, et ils partent pour accomplir cette double mission: «Étant donc partis, ils parcouraient les villages, prêchant l'Évangile et guérissant partout»; ils annoncent l'Évangile en qualité de docteurs, et comme médecins, ils guérissent les malades, et prouvent par leurs miracles la vérité de leurs paroles.

S. Chrys. (hom. 49 sur S. Matth). Hérode n'apprit les miracles de Jésus que longtemps après que la renommée s'en était répandue, preuve de l'orgueil de ce tyran, qui s'était peu soucié de les connaître dès l'origine: «Cependant Hérode le tétrarque entendit parler de tout ce que faisait Jésus». - Théophyl. Cet Hérode était fils d'Hérode le Grand, qui fit périr les enfants de Bethléem, le premier était roi, le second était simplement tétrarque. Or, il voulait savoir ce qu'était le Christ: «Et il ne savait que penser». - S. Chrys. Les pécheurs, en effet, redoutent ce qu'ils connaissent comme ce qu'ils ignorent, ils ont peur de leur ombre. ils soupçonnent partout des embûches, et tremblent au moindre bruit. Telles sont les tristes suites du péché, il dévoile le coupable sans que personne le blâme ou le reprenne, il le condamne sans que personne l'accuse, et il le livre en proie à la crainte et à l'hésitation. L'Évangéliste nous indique les causes de cette crainte: «Et il ne savait que penser, parce que quelques-uns disaient», etc. - Théophyl. Les Juifs espéraient une résurrection des morts, qui leur rendrait une vie toute charnelle de repas et de festins, tandis qu'après la résurrection, les hommes seront affranchis de toutes les actions propres à la chair. - S. Chrys. Hérode ayant donc appris les prodiges que Jésus opérait, dit: «J'ai fait couper la tête à Jean». Ce n'était point par ostentation qu'il évoquait ce souvenir, mais pour calmer ses alarmes, et rassurer son esprit troublé en se rappelant qu'il était l'auteur de la mort de Jean-Baptiste. Et comme il lui avait fait couper la tête, il ajoute: «Qui est donc celui-ci»,etc. - Théophyl. Si c'est Jean-Baptiste qui est ressuscité des morts, en le voyant, il me sera facile de le reconnaître: «Et il cherchait à le voir».

S. Aug (de l'acc. des Evang., 2, 43). Saint Luc, en suivant ici dans son récit le même ordre que saint Marc, ne nous oblige pas de croire que tel fut l'ordre rigoureux des faits. De même que saint Marc, il attribue aussi à d'autres, et non pas à Hérode lui-même, ces paroles: «Jean est ressuscité d'entre les morts»; mais comme il rapporte qu'Hérode ne savait que p enser, on peut admettre, ou bien qu'après ces incertitudes, il finit par ajouter foi au bruit qui se répandait, lorsqu'il dit lui-même à ses serviteurs, selon le récit de saint Matthieu: «C'est Jean-Baptiste, qui est ressuscité des morts», ou bien, il faut entendre ces paroles de saint Matthieu dans un sens dubitatif.


vv. 10-17

9910 Lc 9,10-17

S. Aug. (de l'acc. des Evang., 2, 45). Saint Matthieu et saint Marc, à l'occasion de ce qui précède, rapportent comment Jean-Baptiste fut mis à mort par Hérode. Saint Luc, au contraire, qui avait déjà raconté la mort du saint Précurseur, après avoir parlé des incertitudes d'Hérode au sujet de la personne du Sauveur, ajoute aussitôt: «Et les Apôtres étant de retour, racontèrent à Jésus tout ce qu'ils avaient fait». - Bède. Ils lui rapportent non seulement les miracles qu'ils ont faits, et quel a été le sujet de leurs enseignements, mais ils lui apprennent aussi tout ce que Jean-Baptiste a eu à souffrir pendant qu'ils prêchaient l'Évangile, et ce sont ses propres disciples, ou ceu x de Jean-Baptiste, qui lui apprennent cette nouvelle, comme semble l'indiquer saint Matthieu.

S. Isid. (livre 1, lettre 133). Le Seigneur a en abomination les hommes de sang, et ceux qui entretiennent des relations avec eux, quand ils persévèrent dans leurs crimes; aussi dès qu'il eut appris la mort de Jean-Baptiste, il s'éloigne des meurtriers, et se retire dans un lieu désert: «Et les prenant avec lui, il se retira à l'écart dans un lieu désert, non loin de la ville de Bethsaïde». - Bède. Bethsaïde est une ville de Galilée, située sur les bords du lac de Génésareth, et d'où les apôtres André, Pierre et Philippe étaient originaires. Si le Sauveur s'éloigne ainsi, ce n'est point par crainte de la mort, comme le pensent quelques-uns, mais pour épargner à ses ennemis, dans un sentiment de miséricorde, un nouvel homicide, et aussi pour attendre le temps marqué pour sa passion. - S. Chrys. (hom. 50 sur S. Matth). Jésus ne s'éloigne que lorsqu'il eut appris ce qui venait d'arriver, profitant ainsi de toutes les circonstances pour manifester la vérité de sa chair. - Théophyl. Notre-Seigneur se retire dans un lieu désert pour y opérer le miracle de la multiplication des pains, afin que personne ne pût dire que ces pains avaient été apportés d'une ville voisine. - S. Chrys. (hom. 50 sur S. Matth). Ou bien, il se retire dans un lieu désert, pour que personne ne pût le suivre; mais le peuple ne consent point pour cela à se séparer de lui, et s'attache à ses pas: «Le peuple l'ayant appris, il le suivit»,etc. - S. Cyr. Ils le suivaient, pour lui demander les uns d'être délivrés des démons qui les possédaient, les autres d'être guéris de leurs maladies, d'autres enfin ne se lassaient point de rester avec lui, retenus par le charme de sa doctrine.

Bède. De son côté Jésus, Sauveur aussi puissant que bon, accueille ceux qui sont fatigués, instruit les ignorants, guérit les malades, nourrit ceux qui ont faim, et montre ainsi combien ce pieux empressement des fidèles lui est agréable: «Et il les accueillit avec bonté, et il leur parlait du royaume de Dieu», etc. - Théophyl. Il veut nous apprendre que la sagesse dont nous devons faire profession, consiste dans les paroles et dans les oeuvres, et nous fait un devoir d'enseigner le bien que nous faisons, et de mettre en pratique ce que nous enseignons. Comme le jour était sur son déclin, les disciples commencent à s'inquiéter pour cette nombreuse multitude, dont ils ont compassion. «Or, le jour commençant à baisser, les douze vinrent lui dire», etc. - S. Cyr. Cette multitude, comme nous l'avons dit, venait implorer la guérison de ses diverses souffrances, et les disciples qui savaient qu'il suffisait au Sauveur de le vouloir, pour que tous ces malades fussent guéris, lui disent: «Renvoyez-les, et qu'ils soient délivrés de leurs souffrances».Considérez ici l'immense bonté de celui à qui s'adresse cette prière; non seulement il accorde ce que lui demandent ses disciples, mais il répand avec profusion, sur ce peuple qui le suit, les dons de sa main libérale, en leur commandant de lui donner à manger: «Et il leur répondit: Donnez-leur vous mêmes à manger». - Théophyl. En parlant de la sorte, il n'ignorait pas ce qu'ils allaient lui répondre, mais il voulait les amener à dire combien ils avaient de pains, pour faire ressortir par cette déclaration la grandeur du miracle qu'il allait opérer.

S. Cyr. Mais il était impossible aux disciples d'exécuter cet ordre, puisqu'ils n'avaient avec eux que cinq pains et deux poissons: «Ils lui répartirent: Nous n'avons que cinq pa ins et deux poissons, à moins que nous n'allions acheter de quoi nourrir tout ce peuple». - S. Aug. (de l'acc. des Evang., 2, 46). Saint Luc réunit ici, sous une même phrase, la réponse de Philippe: «Quand on aurait pour deux cents deniers de pain, cela ne suffirait pas pour en donner à chacun un morceau», et celle d'André: «Il y a ici un jeune homme qui a cinq pains d'orge et deux poissons», comme le rapporte saint Jean (Jn 6). En effet, ce que dit saint Luc: «Nous n'avons que cinq pains et deux poissons», se rapporte à la réponse d'André, et ce qu'il ajoute: «A moins que nous n'allions acheter de quoi nourrir tout ce peuple»,renferme la réponse de Philippe, si ce n'est qu'il ne parle pas des deux cents derniers, quoiqu'on puisse dire qu'il y est fait allusion dans la réponse d'André; car, après avoir dit: «Il y a ici un jeune homme qui a cinq pains et deux poissons», il ajoute: «Mais qu'est-ce que cela, pour tant de monde ?» ce qui revient à dire: «A moins que nous n'allions acheter de quoi nourrir tout ce peuple». De cette diversité dans le récit, et de cette concordance dans les faits comme dans les maximes, ressort pour nous cette importante leçon, que nous ne devons chercher dans les paroles, que la volonté de ceux qui parlent, et que les narrateurs, amis de la vérité, doivent s'attacher surtout à la mettre en évidence dans leurs récits, qu'il y soit question de l'homme, des anges ou de Dieu. - S. Cyr. La grande multitude de peuple, dont l'Évangéliste fait connaître le nombre, ajoute encore aux difficultés du miracle: «Or, ils étaient environ cinq mille hommes, sans compter les femmes et les enfants, comme le remarque un autre Évangéliste (Mt 14).

Théophyl. Notre-Seigneur nous enseigne ici, lorsque nous donnons à quelqu'un l'hospitalité, à le faire asseoir, et à lui prodiguer tous les soins qui dépendent de nous: «Jésus dit à ses disciples: Faites les asseoir par groupes de cinquante». - S. Aug. (de l'accord des Evang., 2, 46). Saint Luc dit qu'on les fit asseoir par troupes de cinquante; saint Marc par groupes de cinquante et de cent, mais cette différence ne peut faire difficulté; car l'un des Évangélistes n'exprime qu'une des parties dont les groupes étaient composés, et l'autre la totalité. Si l'un des deux Évangélistes ne parlait que de groupes de cinquante, et l'autre de groupes de cent personnes, la contradiction paraîtrait évidente, et il serait difficile d'admettre que les deux choses soient vraies, mais racontées chacune par un seul des deux Évangélistes; et cependant en y réfléchissant plus attentivement, qui ne reconnaîtra la vraisemblance de cette explication? J'ai fait cette observation, parce qu'il se présente souvent des faits de ce genre qui, pour les esprits superficiels ou prévenus, paraissent contradictoires et ne le sont point. - S. Chrys. (hom. 50 sur S. Matth). Ce devait être un article de la foi chrétienne, que Jésus-Christ était sorti du Père, il lève donc les yeux vers le ciel avant de faire ce miracle: «Alors Jésus, prenant les cinq pains et les deu x poissons, et levant les yeux vers le ciel», etc. - S. Cyr. Il le fait encore pour notre instruction, et pour nous apprendre qu'en commençant le repas, et avant de rompre le pain, nous devons l'offrir à Dieu, et attirer sur lui la bénédiction céleste: «Et levant les yeux au ciel, il les bénit et les rompit». - S. Chrys. (hom. 50). Il distribue ce pain au peuple par les mains de ses disciples, par honneur pour eux, et pour qu'ils n'oublient point le souvenir de ce miracle. Or, ce n'est point du néant qu'il tire les pains et les poissons dont il nourrit ce peuple, afin de fermer la bouche aux manichéens, qui affirment que tout ce qui est créé lui est étranger, et de montrer que c'est lui qui donne la nourriture à tous les êtres créés, et qui a dit: «Que la terre produise les plantes» etc. (Gn 1). Il multiplie aussi les poissons, pour signifier qu'il est le Seigneur de la mer, comme de la terre. Il a opéré, en faveur des malades qu'il a guéris, un miracle particulier, il étend maintenant les effets de sa bonté à toute la multitude, en nourrissant ceux mêmes qui n'ont aucune infirmité: «Tous mangèrent et furent rassasiés». - S. Grég. de Nysse. (grand disc. catéch., chap. 23). Ce n'était point le ciel qui distillait la manne, ni la terre qui produisait le blé selon sa nature, pour subvenir aux besoins de ce peuple; cette abondante largesse sortait des trésors ineffables de la puissance divine. Le pain se multiplie dans les mains de ceux qui le distribuent et il augmente en proportion de la faim de ceux qui mangent. Ce n'est pas non plus de la mer que sortent les poissons dont ils se nourrissent, mais de la main de celui qui, en créant les diverses espèces de poissons, leur a donné la mer pour séjour.

S. Ambr. Ce fut donc grâce à une abondante multiplication des pains que ce peuple fut rassasié. On eût pu voir les morceaux sortir comme d'une source mystérieuse, et se multiplier, sans être divisés entre les mains de ceux qui les distribuaient, et les fragments intacts venir se glisser d'eux-mêmes sous les doigts de ceux qui les rompaient.

S. Cyr. Là ne s'arrête point le miracle, l'Évangéliste ajoute: «Et des morceaux qui restèrent, on emporta douze corbeilles pleines». C'était une preuve manifeste que les oeuvres de charité envers le prochain obtiennent de Dieu une récompense surabondante. - Théophyl. C'était encore pour nous apprendre la merveilleuse puissance de l'hospitalité, et combien nous augmentons nos propres richesses, en les distribuant largement aux indigents. - S. Chrys. Ce ne sont pas des pains entiers qui restent, mais des morceaux, pour prouver que c'étaient bien les restes des pains qui avaient été distribués, et il en reste douze corbeilles, c'est-à-dire, autant qu'il y avait de disciples.

S. Ambr. Dans le sens mystique, c'est après que cette femme, qui était la figure de l'Église, a été guérie d'une perte de sang; après que les Apôtres ont reçu la mission d'annoncer le royaume de Dieu, que le Sauveur distribue l'aliment de la grâce céleste. Mais remarquez ceux qui sont jugés dignes de le recevoir, ce ne sont point des gens oisifs, ni ceux qui restent dans les villes, qui siégent dans la synagogue, ou se reposent avec complaisance dans les dignités séculières, mais ceux qui cherchent Jésus-Christ dans le désert. - Bède. Le Sauveur quitte la Judée, qui, en refusant de croire en lui, s'était ôté l'honneur d'être le siége des prophéties, et il distribue dans le désert l'aliment de la parole divine à l'Église qui n'avait point d'époux. Et lorsqu'il se retire dans le désert des nations, une multitude innombrable de fidèles sortent des murs de leur vie ancienne et de leurs diverses croyances pour s'attacher à ses pas.

S. Ambr. Or, Jésus-Christ accueille avec bonté ceux qui ne se lassent point de le suivre, le Verbe de Dieu s'entretient avec eux, no n des choses du temps, mais du royaume de Dieu, et si quelques-uns souffrent quelque douleur corporelle, il applique sur leurs blessures un remède salutaire. En toute circonstance d'ailleurs, il garde un ordre mystérieux, c'est-à-dire, qu'il guérit d'abord les blessures intérieures par la rémission des péchés, et prodigue ensuite avec abondance la nourriture de la table céleste. - Bède. C'est au déclin du jour qu'il nourrit la multitude, c'est-à-dire, lorsque la fin des temps approche, ou bien, lorsque le soleil de justice s'est incliné et a disparu pour nous (Ml 4, 2). - S. Ambr. Cependant le Sauveur ne donne pas immédiatement à cette multitude les aliments les plus nourrissants. Les cinq pains sont le premier aliment qu'il leur donne comme le lait aux enfants; le second, les sept pains, et le troisième, le corps de Jésus-Christ, qui est la nourriture la plus substantielle. Or, s'il en est qui appréhendent de demander leur nourriture, qu'ils abandonnent toutes choses et se hâtent de venir entendre la parole de Dieu. Celui qui commence à entendre cette divine parole, éprouve bientôt le sentiment de la faim; les Apôtres s'en aperçoivent, et si ceux qui ressentent ce besoin, ne comprennent pas encore ce qu'ils désirent, Jésus-Christ le comprend, il sait qu'ils ne soupirent point après les aliments grossiers, mais après la nourriture céleste qui est Jésus-Christ. Les Apôtres n'avaient pas encore compris que la nourriture du peuple fidèle ne s'achète pas comme un aliment ordinaire, mais Jésus-Christ savait que c'est nous-mêmes qui avions besoin d'être rachetés, tandis que la nourriture qu'il nous destinait devait nous être donnée gratuitement.

Bède. Les Apôtres n'avaient encore que les cinq pains de la loi mosaïque, et les deux poissons des deux Testaments, qui étaient cachés dans les profondeurs obscures des mystères comme dans les eaux de l'abîme. L'homme a reçu cinq sens extérieurs; les cinq mille hommes qui marchent à la suite du Seigneur, figurent donc ceux qui, vivant au milieu du monde, font un bon usage des biens extérieurs qu'ils possèdent. Ils se nourrissent des cinq pains, parce qu'ils ont encore besoin d'être dirigés par les préceptes de la loi. Car pour ceux qui renoncent pleinement au monde, la nourriture de l'Évangile les fait parvenir à une perfection sublime. Les divers groupes qui se nourrissent de ces pains, figurent les assemblées particulières de l'Eglise par toute la terre, et qui toutes ne font qu'une Église catholique.

S. Ambr. Dans le sens spirituel, ce pain qui est rompu par Jésus, est la parole de Dieu, et tout discours qui a Jésus-Christ pour objet, et ils se multiplient quand on les distribue, car c'est au moyen d'un petit nombre de discours qu'il a donné à tous les peuples une abondante nourriture il nous a donné ses divins enseignements, comme autant de pains qui se multiplient en devenant notre nourriture. - Bède. Or, le Sauveur ne crée pas de nouveaux aliments pour rassasier la faim de cette multitude, mais il prend ceux qu'avaient les Apôtres, et il les bénit, parce qu'en effet, dans le cours de sa vie mortelle, il n'annonce point d'autres vérités que celles qui ont été prédites par les prophètes, et il nous fait voir les oracles prophétiques pleins des mystères de la grâce. Il lève les yeux au ciel, pour nous apprendre à diriger vers le ciel toute la force de notre esprit, et à y chercher la lumière de la science. Il rompt les pains et les donne à ses disciples pour les distribuer au peuple, parce que c'est aux Apôtres qu'il a dévoilé les mystères de la loi et des prophètes, en les chargeant de les annoncer par toute la terre.

S. Ambr. Ce n'est pas sans dessein que les restes de ces pains sont recueillis par les disciples, parce que les choses divines se trouvent plus facilement auprès des élus que parmi le peuple. Heureux celui qui p eut recueillir le superflu des âmes versées dans la science divine. Mais pourquoi Jésus-Christ a-t-il voulu qu'on remplît douze corbeilles des morceaux qui restèrent, si ce n'est pour délivrer le peuple juif de cette servitude que le Roi-prophète rappelait en ces termes: «Leurs mains servaient à porter sans cesse des corbeilles ?» (Ps 80). C'est-à-dire que ce peuple qui était condamné à porter de la terre dans des corbeilles (Ex 1 Ex 6), travaille maintenant par les mérites de la croix de Jésus-Christ, à gagner le pain de la vie céleste. Et cette grâce n'est pas le privilège d'un petit nombre, elle est accordée à tous les hommes; ces douze corbeilles, en effet, figurent la multiplication et l'affermissement de la foi dans chaque tribu. - Bède. Ou bien encore, les douze paniers figurent les douze Apôtres et tous les docteurs qui sont venus à leur suite; au dehors, les hommes n'avaient pour eux que du mépris, mais au dedans, ils étaient remplis des précieux restes de la nourriture du salut.


vv. 18-22

9918 Lc 9,18-22

S. Cyr. Le Seigneur se sépare de la foule, et cherche la solitude pour se livrer à la prière: «Un jour qu'il priait seul dans un lieu solitaire», etc. Il se donnait ainsi comme exemple à ses disciples, et leur apprenait à se rendre facile la pratique de sa doctrine. C'est ainsi que les pasteurs des peuples doivent leur être supérieurs par l'éminence de leurs vertus, et leur donner l'exemple d'une application constante aux devoirs de leur ministère et aux oeuvres qui sont agréables à Dieu. - Bède. Les disciples se trouvaient avec le Sauveur, mais nous le voyons seul prier son Père, parce que les saints peuvent bien être unis au Seigneur par les liens de la foi et de la charité, mais le Fils seul peut pénétrer les incompréhensibles secrets des conseils de Dieu. Il prie donc seul en toutes circonstances, parce que les prières de l'homme ne peuvent comprendre les desseins de Dieu, et que nul ne peut entrer en participation des sentiments les plus intimes de Jésus-Christ.

S. Cyr. Cependant cette application à la prière pouvait étonner les disciples, qui voyaient prier, comme un faible mortel, celui qu'ils avaient vu faire des miracles avec une autorité toute divine. C'est donc pour dissiper leurs incertitudes qu'il les interroge, il n'ignorait pas sans doute les témoignages éclatants que le peuple lui rendait, mais il voulait dégager ses disciples des fausses idées qu'un grand nombre s'était faites à son sujet, et leur inspirer les sentiments d'une foi éclairée et véritable: «Il les interrogea, disant: Qui dit-on que je suis ?» etc. - Bède. C'est dans un dessein plein de sagesse que le Sauveur avant d'éprouver la foi de ses disciples, leur demande ce que la foule pense de lui, car il veut que leur profession de foi ait pour fondement, non l'opinion de la multitude, mais la connaissance de la vérité, et qu'ils croient après avoir examiné, au lieu d'être comme Hérode, dans l'incertitude sur ce qu'ils auraient entendu dire. - S. Aug. (de l'acc. des Evang., 2, 53). On peut se demander comment saint Luc a pu dire que le Seigneur interrogea ses disciples sur ce que les hommes pensaient de lui, lorsqu'il était seul à prier, et qu'ils le suivaient, tandis que, d'après saint Marc, il les interrogea en chemin; mais cela ne peut faire difficulté que pour celui qui pense que le Sauveur n'a jamais prié chemin faisant.

S. Ambr. L'opinion de la foule que les disciples rapportent n'est pas indifférente: «Ils lui répondirent: Les uns disent Jean-Baptiste (qu'ils savaient avoir été décapité), les autres Élie (qu'ils croyaient devoir venir), d'autres, un des anciens prophètes qui serait ressuscité». Mais je laisse à de plus habiles d'approfondir ces paroles, car si l'apôtre saint Paul se glorifiait de ne savoir que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié (1Co 2,2), que puis-je moi-même désirer que cette divine science de Jésus? - S. Cyr. Mais voyez quelle sagesse dans cette question; le Sauveur reporta d'abord leurs pensées sur les témoignages extérieurs que le peuple lui rendait, pour en détruire l'impression dans leur esprit, et leur donner une juste idée de sa personne divine. Voilà pourquoi il demande à ses disciples qui lui rapportent l'opinion du peuple, quel est leur propre sentiment: «Et vous, leur demanda-t-il, que dites-vous que je suis ?» Quelle glorieuse distinction dans ce mot: «Et vous !» Il les sépare de la foule pour leur en faire éviter les préjugés, comme s'il leur disait: Vous, que j'ai appelés à l'apostolat par un choix tout particulier, vous, les témoins de mes miracles, que dites-vous que je suis? Pierre prévient tous les autres, il devient l'organe de tout le collège apostolique, il révèle les sentiments d'amour dont son coeur déborde, et proclame sa confession de foi: «Simon Pierre répondit: Le Christ de Dieu». Il ne dit pas simplement: «Christ de Dieu», mais avec l'article, «le Christ de Dieu», par excellence, c'est pourquoi nous lisons dans le grec, ôïí Xñéóôïí; il en est un grand nombre, en effet, qui, ayant reçu l'onction de Dieu, ont été appelés Christs sous divers rapports, les uns ayant reçu l'onction royale, les autres l'onction prophétique (cf. 2M 1,10 1Ch 16,2, etc) .. Nous-mêmes, en vertu de l'onction du Saint-Esprit qui nous a été donnée par Jésus-Christ, nous avons reçu le nom de Christs, mais il n'y en a vraiment qu'un seul qui soit le Christ de Dieu et du Père, parce qu'il est le seul qui, dans un sens véritable ait pour Père celui qui est dans les cieux. Ainsi expliquées, les paroles que saint Luc met dans la bouche du prince des Apôtres, s'accordent avec celles que lui prête saint Matthieu: «Vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant». Saint Luc n'a fait qu'abréger ces paroles, en lui faisant dire: «Le Christ de Dieu». - S. Ambr. Dans ce seul nom, en effet, se trouvent exprimées la divinité du Sauveur, son humanité et la foi en sa passion. Pierre a donc tout embrassé dans cette seule expression, la nature aussi bien que le nom qui est comme l'abrégé de ses perfections.

S. Cyr. Remarquez l'extrême prudence de Pierre, qui confesse un seul Christ, condamnant ainsi ceux qui ont la témérité de diviser l'Emmanuel en deux Christs différents; car il ne leur demande pas: Qu'est le Verbe divin au jugement des hommes, mais: «Qui dit-on qui est le Fils de l'homme ?» Et c'est lui que Pierre confesse être le Fils de Dieu. C'est en cela qu'il est vraiment admirable, et qu'il a été jugé digne des plus grands honneurs, que d'avoir cru et proclamé le Christ du Père, celui qu'il contemplait dans une forme humaine, c'est-à-dire que le Verbe, engendré de la substance du Père, avait daigné se faire homme.

S. Ambr. Cependant Notre-Seigneur ne veut pas encore que sa divinité soit proclamée parmi le peuple, pour éviter toute agitation: «Mais leur parlant avec empire, il leur enjoignit de ne le dire à personne». Il commande le silence à ses disciples pour plusieurs raisons, pour tromper le prince du monde, pour fuir toute vanité, pour nous enseigner l'humilité. Jésus-Christ n'a donc point voulu de la gloire humaine, et vous qui êtes né dans l'obscurité, vous la recherchez avec empressement? Il voulait aussi que ses disciples, encore grossiers et imparfaits, ne fussent point opprimés sous le poids d'une prédication trop relevée. Il leur défend donc d'annoncer qu'il est le Fils de Dieu, afin que plus tard ils puissent prêcher publiquement ses souffrances. - S. Chrys. (hom. 55 in Matth). Le Sauveur a défendu à ses disciples de dire à personne qu'il était le Christ, pour une autre raison non moins pleine de sagesse. Il voulait qu'après avoir fait disparaître tout sujet de scandale et consommé le supplice de la croix, tous ceux qui entendraient la prédication évangélique, eussent de lui une idée juste, car les préjugés qu'on déracine et qu'on arrache tout d'abord, peuvent difficilement rentrer et obtenir créance dans le même esprit; mais ceux qu'on laisse se développer en toute liberté sans les arracher, croissent et s'enracinent avec une merveilleuse facilité; car si une simple allusion aux souffrances de Jésus-Christ suffit pour scandaliser Pierre, que serait-il arrivé au plus grand nombre, lorsque ayant appris qu'il était le Fils de Dieu, il l'aurait vu crucifié et couvert d'opprobres? - S. Cyr. Il fallait donc que les disciples portassent son nom jusqu'aux extrémités de la terre, et cette oeuvre était réservée à ceux qu'il avait appelés à l'apostolat; mais, comme l'atteste l'Esprit saint, «il y a temps pour toute chose» (Qo 3,1), et il fallait que la passion et la résurrection fussent accomplies, avant que les Apôtres prêchassent l'Évangile: «Il faut, disait-il, que le Fils de l'homme souffre beaucoup», etc. - S. Ambr. Peut-être aussi, Notre-Seigneur, qui savait toute la peine que ses disciples auraient à croire le mystère de sa passion et sa résurrection, voulut en être le premier prédicateur.


vv. 23-28

9923 Lc 9,23-28

S. Cyr. Les valeureux capitaines, qui veulent inspirer plus de courage et de hardiesse à ceux qui parcourent avec eux la carrière des armes, ne se contentent pas de leur promettre les honneurs de la victoire, mais cherchent à leur persuader qu'il y a de la gloire même à supporter les souffrances. Notre-Seigneur Jésus-Christ agit de même à l'égard de ses Apôtres. Il leur avait prédit qu'il aurait à souffrir les accusations calomnieuses des Juifs, qu'il serait mis à mort, et qu'il ressusciterait le troisième jour. Mais ils pouvaient croire que ces souffrances devaient être le partage exclusif de Jésus-Christ, sauveur du monde, tandis qu'il leur serait permis de mener une vie molle et sensuelle; il leur apprend donc qu'ils ont à livrer les mêmes combats, s'ils désirent partager sa gloire: «Il disait donc à tout le monde». - Bède. Remarquez ces paroles: «Il disait à tous», parce qu'en effet c'était avec les disciples seuls qu'il avait traité de tout ce qui concernait la foi à sa naissance ou à sa passion.

S. Chrys. (hom. 56 sur S. Matth). Notre-Seigneur, plein de douceur et de bonté, ne veut point qu'on le serve forcément et à regret, mais volontairement, et en lui rendant grâces d'être à son service; aussi il ne force, il ne violente personne, mais c'est par la persuasion et par les bienfaits, qu'il attire à lui tous ceux qui désirent le suivre: «Si quelqu'un veut». - S. Bas. (Const. mon., 4). En disant: «Si quelqu'un veut venir après moi (cf. Jn 12,21) », il se propose lui-même comme modèle de la vie parfaite à ceux qui veulent suivre ses divins enseignements, et il les invite, non pas à le suivre corporellement (ce qui serait impossible, puisque Notre-Seigneur est maintenant dans les cieux), mais à suivre fidèlement les exemples de sa vie, selon la mesure de leurs forces. - Bède. Il faut nécessairement se détacher de soi-même, si l'on veut s'approcher de celui qui est au-dessus de nous, suivant ces paroles du Sauveur: «Qu'il se renonce lui-même». - S. Bas. (règle expliq., quest. 6). L'abnégation de soi-même, c'est l'oubli de toutes les choses de notre vie passée, et l'abandon de nos propres volontés. - Orig. (traité 2 sur S. Matth). On se renonce encore soi-même quand on change les habitudes vicieuses d'une vie mauvaise par la réforme entière de ses moeurs, et par une conversion sincère et véritable; par exemple, celui qui a longtemps vécu dans les plaisirs, se renonce soi-même, quand il devient chaste, et ainsi toutes les fois qu'on s'abstient d'un vice quelconque, on se renonce soi-même. - S. Bas. (règle). Or, désirer mourir pour Jésus-Christ, mortifier les membres de l'homme terrestre (Col 3), être disposé à supporter courageusement toutes les épreuves pour Jésus-Christ, n'avoir aucune affection pour la vie présente, c'est véritablement porter sa croix: «Et qu'il porte sa croix tous les jours de sa vie». - Théophyl. La croix, dans la pensée du Sauveur, c'est une mort ignominieuse, et il nous fait entendre ici que celui qui veut suivre le Christ, ne doit point reculer devant la perspective d'une mort semblable. - S. Grég. (hom. 32 sur l'Evang). On peut encore porter sa croix de deux manières, ou lorsqu'on mortifie son corps par la pénitence, ou lorsque l'âme s'attriste et s'afflige en compatissant aux souffrances des autres.

S. Grég. (ou le moine Isaac, Ch. des Pèr. gr). Notre-Seigneur réunit à dessein ces deux choses: «Qu'il se renonce lui-même, et qu'il porte sa croix»; car de même que celui qui est prêt à monter sur la croix, est tout disposé intérieurement à souffrir ce genre de mort, et n'a plus que de l'indifférence pour la vie présente; ainsi celui qui veut suivre le Seigneur, doit d'abord se renoncer lui-même, et ensuite porter sa croix, de sorte que dans son âme, il soit prêt à supporter toute espèce de souffrance. - S. Bas. (explic. des règles, quest. 8). La perfe ction consiste donc à tenir son âme dans une complète indifférence pour la vie présente et à être toujours prêt à mourir, en évitant toutefois la confiance en soi-même. Or, cette perfection doit commencer par le renoncement aux choses extérieures, par exemple, aux richesses, à la vaine gloire, et par le détachement intérieur de toutes les choses inutiles.

Bède. C'est donc pour nous une obligation de porter chaque jour cette croix, et de marcher à la suite du Seigneur, qui a voulu porter lui-même sa croix: «Et qu'il me suive». - Orig. Il donne la raison de ce commandement, en ajoutant: «Car celui qui voudra sauver son âme, la perdra», c'est-à-dire celui qui veut jouir de la vie présente et de toutes les satisfactions qu'offrent à son âme les choses sensibles, perdra son âme qu'il néglige de conduire au terme de la béatitude véritable. Il ajoute, au contraire: «Et celui qui perdra son âme à cause de moi, la sauvera», c'est-à-dire, celui qui méprise les biens sensibles, et ne craint point par amour pour la vérité de s'exposer à la mort, sauvera bien plutôt son âme et sa vie, dont il semble faire le sacrifice à Jésus-Christ. Si donc c'est un véritable bonheur de procurer à son âme le salut qui vient de Dieu, on peut dire que c'est une perte heureuse, que de perdre son âme pour l'amour de Jésus-Christ. On peut encore dire, par analogie avec ce renoncement tel que nous venons de l'expliquer, que chacun doit perdre son âme livrée au péché, pour prendre celle qui doit son salut à la pratique de la vertu.

S. Cyr. Le Sauveur veut faire comprendre combien cette participation aux souffrances du Christ surpasse de beaucoup les jouissances que donnent les plaisirs et les biens de ce monde, et il ajoute: «Que sert à l'homme de gagner le monde entier, s'il vient à se perdre lui-même à son détriment ?» comme s'il disait: Qu'un homme, par attachement aux douceurs et aux avantages de la vie présente, refuse de souffrir, et aime mieux vivre, s'il est riche, au milieu du luxe et de l'opulence, que lui en reviendra-t-il, lorsqu'il aura perdu son âme? En effet, «la figure du monde passe (1Co 7); les plaisirs disparaissent comme l'ombre (Sg 5); les trésors de l'iniquité ne serviront de rien, mais la justice délivrera de la mort». (Pv 10).

S. Grég. (hom. 32). La sainte Église traverse deux sortes de temps dans la vie présente, les temps de persécution et les temps de paix, et Notre-Seigneur donne ici des préceptes pour ces deux circonstances si différentes. Dans les temps de persécution, il faut être prêt à sacrifier son âme, c'est-à-dire sa vie, selon ces paroles: «Celui qui perdra sa vie»; dans les temps de paix, au contraire, il faut s'appliquer à réprimer les désirs terrestres, qui exercent sur nous une influence tyrannique, et c'est à quoi Notre-Seigneur nous engage par ces paroles: «Que sert à l'homme de gagner tout l'univers, s'il vient à perdre son âme ?» Souvent nous méprisons les choses fragiles et passagères, mais nous sommes encore retenus par l'habitude du respect humain, qui nous empêche de professer publiquement les sentiments de droiture et de justice, que nous conservons au dedans de nous-mêmes. Notre-Seigneur nous donne un remède convenable pour cette blessure: «Car si quelqu'un rougit de moi et de mes paroles, le Fils de l'homme rougira de lui». - Théophyl. On rougit de Jésus-Christ, quand on dit: Est-ce que je croirai à un crucifié? On rougit de ses discours, en méprisant la simplicité de l'Évangile. Or, le Seigneur rougira de celui qui rougit de lui, comme un père de famille rougirait de nommer un de ses mauvais serviteurs.

S. Cyr. Il pénètre ses disciples d'une crainte salutaire en leur annonçant qu'il descendra des cieux, non plus dans son premier état d'humiliation, et sous une forme semblable à la nôtre, mais dans la gloire du Père et au milieu des anges: «Lorsqu'il viendra dans sa majesté et dans celle du Père; et des saints-anges»;. Ce sera donc un malheur affreux de paraître avec le signe de l'inimitié, et les mains vides de bonnes oeuvres, lorsque ce grand juge descendra au milieu des célestes cohortes des anges. Apprenez encore de là que pour avoir pris une chair semblable à la nôtre, le Fils n'en est pas moins Dieu, puisqu'il annonce qu'il viendra dans la majesté de Dieu son Père, environné des anges qui exécuteront les ordres qu'il leur donnera comme juge de tous les hommes, lui qui s'est fait homme-semblable à nous.

S. Ambr. Toutes les fois que Notre-Seigneur excite ses disciples, à la pratique de la vertu par la perspective des récompenses éternelles, et qu'il leur enseigne combien il est utile de mépriser les choses de la terre, il soutient en même temps la faiblesse de l'esprit humain par l'attrait d'une récompense présente. Il est dur et pénible, en effet, de porter sa croix, d'exposer son âme aux dangers, et son corps à la mort, de renoncer à ce que vous êtes, lorsque vous voulez être ce que vous n'êtes pas; et il est rare que la vertu la plus éminente consente à sacrifier les choses présentes à l'espérance des biens futurs. Aussi, notre bon Maître, pour prévenir toute tentation de découragement ou de désespoir, promet qu'il se révélera immédiatement à ses fidèles serviteurs: «Je vous le dis, en vérité, quelques-uns, de ceux qui sont ici présents, ne goûteront point la mort, qu'ils n'aient vu le royaume de Dieu».

Théophyl. C'est-à-dire la gloire dont jouissaient les justes; le Sauveur veut parler de la transfiguration qui était le symbole de la gloire future, comme s'il disait: Quelques-uns de ceux qui sont ici (c'est-à-dire Pierre, Jacques et Jean) ne mourront point avant d'avoir vu dans ma transfiguration la gloire réservée à ceux qui auront confessé mon nom. - S. Grég. (hom. 32). Ou bien, ce royaume de Dieu; c'est l'Église actuelle, et quelques-uns des disciples devaient vivre assez longtemps sur la terre pour voir l'Église de Dieu établie, et dominant la gloire du monde. - S.Ambr. Si donc nous voulons n'avoir pas à craindre la mort, tenons-nous toujours auprès de Jésus-Christ; car ceux-là seuls ne goûteront point la mort, qui peuvent se tenir étroitement unis à Jésus-Christ. Or, on peut conclure du sens propre de ces paroles, que ceux qui ont mérité d'être admis dans la société de Jésus-Christ, ne ressentiront pas les atteintes mêmes les plus légères de la mort. Sans doute, ils goûteront, comme en passant, la mort du corps, mais ils posséderont pour toujours la vie de l'âme; car ce n'est point au corps, mais à l'âme, qu'est accordé le privilège de l'immortalité.



Catena Aurea 9907