Catena Aurea 13427

vv. 27-31

13427 Jn 14,27-31

S. Chrys. (hom. 75 sur S. Jean). Ces paroles du Sauveur à ses disciples: «Je vous laisse ma paix», leur faisaient pressentir son départ et pouvaient leur inspirer un sentiment de trouble; il se hâte donc de sur dire: «Que votre coeur ne se trouble point et ne s'effraie point». Ce double sentiment était produit en eux l'un par l'amour, l'autre par la crainte.

S. Aug. (Traité 78 sur S. Jean). Ce qui pouvait être pour eux une cause de trouble et d'effroi, c'est que Jésus les quittait (quoiqu'il dût revenir), et que pendant cet intervalle, le loup pouvait profiter de l'absence du pasteur pour fondre sur le troupeau: «Vous avez entendu, leur dit le Sauveur, que je vous ai dit: Je m'en vais et reviens à vous». Il s'en allait en tant qu'homme, et il restait en tant que Dieu. Mais pourquoi ce trouble et cet effroi, puisqu'en se dérobant à leurs regards, Jésus n'abandonnait pas leur coeur? Or, pour leur faire comprendre que c'était comme homme qu'il leur avait dit: «Je m'en vais et je reviens à vous»; il ajoute: «Si vous m'aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je m'en vais à mon Père», etc. C'est en tant qu'il n'était pas égal au Père, que le Fils devait aller à son Père, d'où il devait revenir juger les vivants et les morts. Mais en tant qu'il est égal à celui qui l'a engendré, il ne se sépare jamais de son Père, mais il est tout entier avec lui en tout lieu en vertu de cette divinité qu'aucun lieu ne peut limiter. Aussi le Fils de Dieu, égal à son Père dans la forme de Dieu (car il s'est anéanti lui-même sans perdre la forme de Dieu, mais en prenant la forme de serviteur - Ph 2), est plus grand que lui-même, puisque la forme et la nature de Dieu qu'il n'a point perdues, sont plus grandes que la forme et la nature de serviteur qu'il a prises. A ne considérer que cette forme de serviteur, le Fils de Dieu est inférieur, non-seulement au Père, mais à l'Esprit saint; sous ce rapport Jésus-Christ enfant était inférieur à ses parents, puisqu'il leur était soumis dans son enfance, comme l'Évangile nous l'apprend (Lc 2). Reconnaissons donc en Jésus-Christ deux natures, la nature divine, qui le fait égal au Père, et la nature humaine, qui le rend inférieur au Père. Or, ces deux natures ne font point deux Christs, mais un seul Christ; de sorte qu'il n'y a pas en Dieu quaternité, mais trinité. Or, Notre-Seigneur dit: «Si vous m'aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je m'en vais à mon Père». Félicitons, en effet, la nature humaine, de ce que le Fils unique de Dieu a daigné la prendre pour la placer dans les cieux, au sein de l'immortalité, de ce que la terre a été élevée si haut, et de ce que la poussière, devenue incorruptible, s'est assise à la droite le Dieu le Père. Qui ne se réjouirait, s'il aime Jésus-Christ, qui n'applaudirait de voir sa nature revêtue de l'immortalité dans la personne du Christ, et d'espérer obtenir lui-même un jour cette immortalité par les mérites de Jésus-Christ ?

S. Hil. (de la Trin., 9) Ou bien encore, si le Père est plus grand que moi, en vertu de l'autorité de celui qui donne, est-ce que le Fils ne lui est pas inférieur, par-là même qu'il reconnaît avoir reçu de son Père? Oui, celui qui donne est plus grand, mais le Fils n'est pas inférieur, puisque son Père lui donne d'être un seul et même Dieu avec lui. - S. Chrys. On peut encore donner cette explication: Les Apôtres ne savaient pas en quoi consistait cette résurrection qu'il leur avait prédite, en leur disant: «Je m'en vais et je reviens à vous», et ils n'avaient pas encore de lui une idée convenable, tandis qu'ils regardaient le Père comme infiniment plus grand et plus élevé. Il leur dit donc: «Vous craignez que je ne sois pas assez puissant pour me secourir moi-même, et vous ne pouvez croire que je revienne vous voir après ma mort sur la croix; mais au moins vous devriez vous réjouir de m'entendre dire que je vais à mon Père qui est plus grand que moi, et qui est assez puissant pour renverser tous les obstacles». Il accommodait ainsi son langage à la faiblesse de ses disciples, et c'est pour cela qu'il ajoute: «Et je vous le dis maintenant, avant que cela arrive, afin que quand ce sera arrivé, vous croyiez».

S. Aug. (Traité 79 sur S. Jean). Que veulent dire ces paroles? Est-ce que l'homme ne doit pas croire bien plutôt ce qui lui est proposé comme l'objet de sa foi avant son accomplissement? Le véritable mérite de la foi, c'est de croire ce qu'on ne voit point, car cet Apôtre à qui Jésus a dit: «Vous avez cru parce que vous avez vu», il a vu une chose et en a cru une autre, il a vu en Jésus-Christ un homme, et il a cru qu'il était Dieu. On dit bien, il est vrai, qu'on croit ce que l'on voit, qu'on en croit à ses propres yeux, mais ce n'est point là cette foi qui s'établit dans nos coeurs; les choses que nous voyons ne sont que le moyen par lequel nous croyons celles que nous ne voyons pas. Ces paroles: «Quand cela sera arrivé», signifient donc qu'après qu'il sera mort, ils le verront de nouveau plein de vie, et qu'en le voyant ils croiront fermement qu'il était le Christ, fils de Dieu, qui a pu opérer un tel prodige et le prédire avant de l'accomplir. Et ils le devaient croire, non d'une foi nouvelle, mais d'une foi plus complète, ou si l'on veut, d'une foi qui avait faibli au moment de sa mort, mais qui s'était ranimée lors de sa résurrection.

S. Hil. (de la Trin., 9) Notre-Seigneur leur fait connaître ensuite ce qui devait lui mériter la gloire qui devait suivre sa mort: «Je ne vous parlerai plus guère». - Bède. Il s'exprime de la sorte, parce que le moment approchait où on allait se saisir de sa personne et le mettre à mort: «Car le prince de ce monde vient». - S. Aug. Quel est ce prince du monde si ce n'est le démon? Il n'est point toutefois le prince de toutes les créatures, mais seulement des pécheurs. Aussi lorsque l'Apôtre nous dit: «Nous avons à combattre... contre les princes de ce monde» (Ep 6, 12), il ajoute: «De ce monde de ténèbres», c'est-à-dire, du monde composé des hommes impies, «et il n'a rien en moi», parce que le Fils de Dieu était venu sans péché, et la très-sainte Vierge n'avait pas conçu et enfanté sa chair d'une source empoisonnée par le péché. Mais alors, pouvait-on lui dire: Pourquoi devez-vous souffrir la mort, si vous êtes sans péché, puisque la mort est la peine du péché? Il prévient cette objection en ajoutant: «Mais afin que le monde connaisse que j'aime mon Père, et que selon le commandement que mon Père m'a donné, ainsi je fais; levez-vous, sortons d'ici». En effet, il était encore à table avec ses disciples, lorsqu'il leur adressait le discours qui précède; il dit: «Allons», en se dirigea nt vers le lieu où on devait se saisir de sa personne pour le livrer à la mort, bien qu'il n'eût aucunement mérité la mort; mais son Père lui commandait de mourir, et il voulait donner l'exemple de l'obéissance par amour.

S. Aug. (contr. le disc. des Ar., 2) L'obéissance du Fils à la volonté et aux ordres de son Père, n'est point une preuve même parmi les hommes, de la diversité et de l'inégalité de nature entre le Père qui commande et le Fils qui obéit, et il y a ici quelque chose de plus, c'est que Jésus-Christ n'est pas seulement Dieu, en quoi il est égal à son Père, mais il est homme aussi, et par conséquent d'une nature inférieure à celle de son Père. - S. Chrys. (hom. 76 sur S. Jean). On peut dire encore que ces paroles: «Levez-vous, sortons d'ici», sont le commencement d'un autre ordre d'idées. Le temps, comme le lieu, étaient pour les disciples une cause naturelle de crainte et d'effroi. Ils étaient dans un endroit connu et ouvert de toutes parts; la nuit était profonde, et ils ne prêtaient qu'une médiocre attention aux paroles du Sauveur, tournant les yeux de côté et d'autre, et s'imaginant toujours voir entrer ceux qui devaient les attaquer. Ce que le Sauveur venait de leur dire: «Je ne vous parlerai plus guère, car le prince de ce monde est venu», ajoutait à leur frayeur. Jésus les voyant sous cette impression en entendant ses paroles, les conduit dans un autre lieu, où la pensée qu'ils étaient plus en sûreté leur laisserait plus de liberté d'esprit pour écouter attentivement les grandes vérités qu'il avait à leur révéler.


CHAPITRE XV


vv. 1-3

13501 Jn 15,1-3

S. Hil. (de la Trin., 9) Notre-Seigneur se lève et se hâte d'aller consommer le mystère de sa passion par l'amour qui le porte à exécuter les ordres de son Père. Cependant il veut expliquer auparavant le mystère de son incarnation, en vertu de laquelle nous lui sommes unis, comme les branches sont unies à la vigne: «Je suis la vraie vigne», dit-il à ses disciples. - S. Aug. (Traité 80 sur S. Jean). Le Sauveur parle ici comme étant le chef de l'Eglise, dont nous sommes les membres, comme le médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme. (1Tm 5) En effet, les branches de la vigne sont de même nature que la tige. Mais lorsque Notre-Seigneur dit: «Je suis la vraie vigne», a-t-il ajouté le mot vraie par opposition à la vigne, qu'il prend ici pour terme de comparaison? Car on lui donne le nom de vigne dans un sens ligure et non au littéral, de même qu'on lui donne les noms d'agneau, de brebis et d'autres encore, où la réalité extérieure existe bien plutôt dans tas choses qui sont prises comme objets de comparaison. En disant: «Je suis la vraie vigne», il a donc voulu se séparer de cette vigne, à laquelle Dieu dit, par son Prophète: «Comment vous êtes-vous changée en amertume, ô vigne étrangère ?» (Jr 2, 21). Et comment serait-elle la vraie vigne, elle qui, au lieu de fruits qu'on attendait, n'a produit que des épines? (Is 5)

S. Hil. (de la Trin., 9) Mais le Sauveur a soin de distinguer la majesté divine de son Père de l'humble nature dont il s'est revêtu dans son incarnation, et il le représente comme étant le vigneron intelligent qui cultive cette vigne: «Et mon Père est le vigneron». - S. Aug. Nous cultivons Dieu, et Dieu nous cultive; mais nous cultivons Dieu non pour le rendre me illeur, nous le cultivons en l'adorant et non en le labourant; tandis que Dieu nous cultive pour nous rendre meilleurs que nous ne sommes; c'est notre âme qui est l'objet de cette culture, et il ne cesse d'extirper tous les mauvais germes de notre coeur, de l'ouvrir par sa parole comme avec le soc de la charrue, d'y jeter la semence de ses commandements, et d'en attendre le fruit de la piété.

S. Chrys. Mais Jésus-Christ se suffit à lui-même, tandis que les disciples ont un grand besoin de la main du laboureur; aussi ne dit-il rien de la vigne elle-même, il ne parle que des branches: «Toute branche qui ne porte point de fruit en moi, il la retranchera». Ce fruit c'est la vie de la grâce, et Notre-Seigneur nous apprend ainsi que sans les oeuvres, nous ne pouvons lui être unis. - S. Hil. (de la Trin., 9) Quant aux branches inutiles et infructueuses, il les coupera et les jettera au feu. - S. Chrys. Ceux mêmes qui sont arrivés à une haute vertu ont besoin de l'opération de ce céleste vigneron, et c'est pour cela qu'il ajoute: «Et la branche qui porte du fruit il l'émondera, afin qu'elle en porte davantage». Il veut parler ici des tribulations qui les attendaient, et Il leur enseigne que les épreuves les rendront plus forts et plus vigoureux, de même qu'on rend la branche de la vigne plus féconde en la taillant et en l'émondant.

S. Aug. Mais qui peut se glorifier d'être si pur dans cette vie, qu'il n'ait point besoin d'être purifié encore davantage, puisque si nous disons que nous n'avons pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes? (1Jn 1,1) Dieu purifie donc ceux qui sont déjà purs, afin que cette pureté plus grande, soit aussi la cause d'une plus grande fécondité. Or, Notre-Seigneur Jésus-Christ est la vigne, sous le même rapport qui lui fait dire: «Mon Père est plus grand que moi» (Jn 14). Mais lorsqu'il dit: «Mon Père et moi ne sommes qu'un», (Jn 10) il est également le vigneron. Et il n'est point vigneron, comme ceux qui ne peuvent que donner leur travail extérieur, son opération va jusqu'à produire l'accroissement intérieur. Aussi se représente-t-il aussitôt comme, celui qui émonde aussi la vigne: «Déjà, leur dit-il, vous êtes purs, à cause des paroles que je vous ai dites». Voilà donc qu'il émonde les branches, ce qui est l'office du vigner on et non de la vigne. Mais pourquoi ne dit-il pas: Vous êtes déjà purs, à cause, du baptême dans lequel vous avez été lavés? Parce que, dans l'eau du baptême, c'est la parole qui purifie. Otez la parole, et l'eau n'est plus que de l'eau ordinaire. La parole vient se joindre à l'eau, et forme de sacrement. Or, d'où peut venir à l'eau cette si grande vertu de purifier le coeur en touchant le corps, si ce n'est de la parole, et non pas de la parole simplement dite, mais de la parole qui est crue? Il faut distinguer, en effet, dans la parole, le son qui passe de la vertu qui demeure. Cette parole de la foi a une telle puissance dans l'Eglise de Dieu, que par celui qui croit, qui offre, qui bénit, qui répand l'eau, elle purifie l'enfant, qui est encore incapable de croire - S. Chrys. Ou bien encore, tel est le sens de ces paroles: Vous êtes purs, à cause des paroles que je vous ai dites. C'est-à-dire, vous avez reçu la lumière de la doctrine, et vous êtes délivrés des erreurs judaïques.


vv. 4-7

13504 Jn 15,4-7

S. Chrys. (hom. 75 sur S. Jean) Après leur avoir déclaré qu'ils purs à cause des instructions qu'il leur avait données, il leur enseigne à faire ce qui dépend d'eux pour prêter leur concours à la grâce: «Demeurez en moi, et moi en vous». - S. Aug. (Traité 81 sur S. Jean.) Ils n'étaient pas en lui de la même, manière qu'il était en eux, car cette union réciproque ne pouvait être utile qu'à eux seuls. Les branches sont unies étroitement à la vigne, mais sans lui rien communiquer; tandis que c'est d'elle qu'ils tiren t le principe de leur vie. La vigne, au contraire, est unie aux branches de manière à leur communiquer sa sève vivifiante, sans rien recevoir d'eux. Ainsi cette demeure de Jésus-Christ dans les apôtres et des apôtres dans Jésus-Christ, n'a d'autre but que leur avantage et non celui de Jésus-Christ. C'est pour cela qu'il ajoute: «De même que la branche ne peut porter de fruit si elle ne demeure unie à la vigne, ainsi vous ne le pouvez non plus si vous ne demeurez en moi». Quel magnifique éloge de la grâce ! Comme il est propre à instruire les coeurs des humbles et à fermer la bouche des superbes ! N'est-ce pas contredire cette vérité que de ne pas croire à la nécessité d'un secours divin pour faire le bien, et ceux qui sont dans cette erreur que font-ils? Loin d'affirmer et de défendre le libre arbitre, ils ne font que le ruiner. Celui qui s'imagine pouvoir porter du fruit par lui-même, n'est pas uni à la vigne; celui qui n'est pas dans la vigne n'est pas dans Jésus-Christ, et celui qui n'est pas dans Jésus-Christ n'est pas chrétien. - Alcuin. Tout le fruit des bonnes oeuvres vient comme de sa racine, de celui qui nous a délivrés par sa grâce, et nous donne par son secours une force nouvelle pour nous faire produire du fruit en plus grande abondance. Aussi Notre-Seigneur revient sur cette vérité, en lui donnant un plus grand développement: «Je puis la vigne, et vous êtes les branches; si quelqu'un demeure en moi (par la foi, l'obéissance, la persévérance), et moi en lui, (par les lumières que je répands dans son âme, par ma grâce et le don de persévérance), celui-là, (à l'exclusion de tout autre), portera beaucoup de fruit». - S. Aug. Et que personne ne s'imagine que la branche puisse produire par elle-même quelque peu de fruit, car Notre-Seigneur ajoute: «Sans moi, vous ne pouvez rien faire». Il ne dit pas: Vous pourrez faire peu de chose, car si la branche ne demeure attachée à la vigne, et ne tire de sa racine la sève qui lui donne la vie, elle ne peut absolument produire aucun fruit. Or, bien que Jésus-Christ ne pût être la vigne, s'il n'était homme, cependant il ne pourrait communiquer une si grande vertu aux branches, s'il n'était également Dieu.

S. Chrys. Vous voyez que le Fils procure autant de grâces aux disciples que le Père. Le Père émonde l es branches, le Fils les tient unies avec lui, et leur donne ainsi la vertu de produire des fruits. Et cependant nous avons vu qu'il appartient aussi au Fils d'émonder, de même que le Père qui a engendre la racine, nous donne aussi de demeurer attaché à la racine; c'est donc déjà un grand malheur que de ne pouvoir rien faire absolument; toutefois Notre-Seigneur ne s'arrête pas là, et il ajoute: «Celui qui ne demeure pas en moi, sera jeté comme le sarment (c'est-à-dire, qu'il n'aura aucune part aux soins du vigneron), et il séchera (c'est-à-dire, qu'il perdra le peu de sève qu'il avait reçue de la racine, et qu'il sera privé de tout secours et de la vie), et on le ramassera». - Alcuin. (Ce sont les anges qui le recueilleront), et on le jettera au feu, et il brûlera. -
S. Aug. Car plus le bois de la vigne est précieux, s'il demeure uni à la vigne, plus il est vil et méprisable s'il vient à en être détaché, il n'y a pour la branche d'autre alternative que d'être unie à la vigne ou d'être jetée dans le feu. Si elle ne reste point attachée à la vigne, elle sera jetée au feu; qu'elle demeure donc unie à la vigne pour éviter le feu.

S. Chrys. Notre-Seigneur explique ensuite ce que c'est que de demeurer en lui: «Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez tout ce que vous voudrez, et il vous sera accordé». Ce qu'il demande, c'est le témoignage des oeuvres. - S. Aug. Ses paroles demeurent en nous, lorsque nous accomplissons ses commandements et que nous aimons ses promesses, ma is si ses paroles ne restent que dans la mémoire, et qu'on n'en trouve aucune trace dans la vie, le sarment ne fait plus partie de la vigne, parce qu'il ne tire plus sa vie de la racine. Or, que peuvent vouloir ceux qui demeurent en Jésus-Christ, que ce qui a rapport à leur salut? En effet, ce que nous voulons lorsque nous sommes unis à Jésus-Christ, est tout différent de ce que nous voulons, lorsque nous sommes encore attachés au monde. Il arrive quelquefois que la partie de nous-mêmes qui demeure encore dans le monde, nous suggère des prières dont nous ne voyons pas l'opposition avec notre salut, mais loin de nous la pensée que nous obtenions ce que nous demandons, si nous demeurons eu Jésus-Christ, qui n'exauce que les prières qui nous sont utiles. La prière qui commence par ces mots: «Notre Père», fait partie des paroles de Jésus-Christ, dont il est ici question, prenons donc soin de ne pas nous écarter dans nos demandes des paroles et de l'esprit de cette divine prière, et tout ce que nous demanderon s nous sera infailliblement accordé.


vv. 8-11

13508 Jn 15,8-11

S. Chrys. (hom. 75 sur S. Jean). Notre-Seigneur venait de déclarer à ses disciples, que ceux qui lui tendaient des embûches et ne demeuraient pas en Jésus-Christ, seraient condamnés au feu; il leur prédit maintenant qu'ils seront à l'épreuve de toutes les attaques, et qu'ils porteront beaucoup de fruits: «C'est la gloire de mon Père que vous portiez beaucoup de fruit», c'est-à-dire, si la gloire de mon Pèreest intéressée à ce que vous portiez du fruit, il ne négligera pas sa gloire; or, celui qui produit du fruit est disciple de Jésus-Christ, comme l'ajoute Notre-Seigneur: «Et que vous devenez mes disciples». - Théophyl. Le fruit que devaient porter les Apôtres sont les nations qu'ils ont enchaînées à la foi par leurs enseignements, et dont ils ont fait autant d'instruments de la gloire de Dieu. - S. Aug. (Traité 82 sur S. Jean). Que l'on traduise, c'est l'honneur ou la gloire, clarificatus, sive glorificatus, l'un et l'autre de ces deux mots sont la traduction du même mot grec d üaeá, en latin, gloria, gloire; j'ai cru utile de faire cette remarque, pour que nous ne soyons pas tentés de tourner à notre propre gloire le mérite de nos bonnes oeuvres, comme s'il venait de nous, car il vient de sa grâce, et nous devons lui en renvoyer exclusivement la gloire. Qui pourrait, en effet, nous faire produire du fruit, si ce n'est celui dont la miséricorde nous a prévenus? Aussi le Sauveur ajoute-t-il: «Comme mon Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés». Voilà pour nous le principe de toutes les bonnes oeuvres, et d'où pourraient-elles venir, si ce n'est de la foi qui opère par la charité? Et comment aurions-nous pu l'aimer, s'il ne nous aimait le premier? Quant à ces paroles: «Comme mon Père m'a aimé, moi aussi je vous aime», elles n'emportent pas l'égalité de nature entre nous et Jésus-Christ, comme elle existe entre son Père et lui, elles signifient simplement la grâce du médiateur de Dieu et des hommes, Jésus-Christ homme. C'est cette médiation qu'il veut exprimer, lorsqu'il dit: «Comme mon Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés», car le Père nous aime aussi, mais en Jésus-Christ.

S. Chrys. Si donc le Père vous aime, prenez confiance, et s'il y va de la gloire du Père, efforcez-vous de produire du fruit. Et pour prévenir toute négligence de leur part, il ajoute: «Demeurez dans mon amour». Comment? «Si vous gardez mes commandements»,etc. - S. Aug. Qui doute que l'amour ne précède l'observation des commandements? Celui qui n'aime pas, n'a aucun motif de garder les commandements. Ce n'est donc point le principe et la cause, mais les effets de l'amour que le Sauveur veut nous indiquer ici, afin que personne ne s'illusionne en affirmant qu'il aime Dieu, sans garder ses commandements? Toutefois ces paroles: «Demeurez dans mon amour», ne précisent pas de quel amour Notre-Seigneur veut parler, de celui que nous avons pour lui, ou de celui qu'il a pour nous; et ce n'est que par ce qui précède que nous pouvons le savoir. En effet, après avoir dit: «Je vous ai aimés», il ajoute aussitôt: «Demeurez dans mon amour», c'est-à-dire, dans l'amour dont il les a aimés. Or, que signifient ces paroles: «Demeurez dans mon amour ?» persévérez dans ma grâce? Et que veut-il dire quand il ajoute: «Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour ?» Le signe certain que vous persévérez dans l'amour que j'ai pour vous, c'est la fidélité à observer mes commandements. Ce n'est donc point pour mériter son amour que nous observons ses commandements, mais nous ne pouvons les observer, s'il ne nous aime le premier. C'est la grâce qui est révélée aux humbles et qui demeure cachée aux superbes. Mais quel est le sens des paroles suivantes: «Comme moi-même j'ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour ?» Le Sauveur veut aussi parler de l'amour que son Père a pour lui. Mais devons-nous entendre que le Père aime son Fils par grâce, dans le même sens que nous sommes redevables à la grâce de l'amour du Fils, alors que nous sommes les enfants de Dieu, non par nature, mais par grâce, tandis que le Fils unique est Fils par nature et non par grâce? Ou bien faut-il entendre ces paroles du Fils de Dieu fait homme? Oui, sans doute, car ces paroles: «Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous aime», expriment la grâce du médiateur; or c'est comme homme et non comme Dieu que Jésus-Christ est médiateur de Dieu et des hommes. Nous pouvons donc, dire en toute vérité, que bien que la nature humaine n'ait point de rapport avec la nature divine, cependant elle a été unie à la personne du Fils de Dieu, par un effet de la grâce, et d'une grâce si extraordinaire, qu'il n'en est ni de plus grande, ni même d'égale. En effet, cette union de la nature divine avec la nature humaine, n'est la récompense d'aucun mérite de la part de l'homme, et c'est de cette union, au contraire, que les mérites des hommes ont découlé comme de leur source. - Alcuin. Or l'Apôtre nous apprend de quels préceptes le Sauveur a voulu ici parler lorsqu'il dit: «Jésus-Christ s'est rendu obéissant à son Père jusqu'à la mort, et jusqu'à la mort de la croix». (Ph 2, 8).

S. Chrys. (hom. 77 sur S. Jean). Mais comme sa passion qui approchait et de tristes paroles étaient de nature à troubler et interrompre leur joie; le Sauveur ajoute: «Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous, et que cette joie soit pleine et parfaite», c'est-à-dire, bien que la tristesse doive s'emparer de vous, je la dissiperai et je la changerai à la fin en joie. - S. Aug. (Traité 83). Quelle est cette joie de Jésus-Christ en nous, si ce n'est celle dont il daigne se réjouir à notre occasion? Et quelle est notre joie dont il nous prédit le parfait accomplissement, si ce n'est la participation à son propre bonheur? La joie qu'il avait à notre sujet était déjà parfaite, quand il nous prédestinait dans sa prescience divine, mais cette joie n'était pas encore en nous, parce que nous n'existions pas encore. Elle a remmenée à être en nous, lorsqu'il nous a appelés à la foi, et nous disons à juste titre que cette joie est notre joie, puisque c'est elle qui doit faire un jour notre félicité, elle commence avec la foi qui nous régénère, elle sera pleine et parfaite avec la résurrection qui sera notre récompense.


vv. 12-16

13512 Jn 15,12-16

Théophyl. Notre-Seigneur avait prédit à ses disciples que s'ils observaient sus commandements, ils demeureraient dans son amour, il leur enseigne ici quels sont les commandements qu'ils doivent observer: «Voici mon commandement, c'est que vous vous aimiez les uns les autres». - S. Grég. (hom. 27 sur les Evang). Toutes les pages des saintes Lettres sont remplies des commandements de Dieu, comment donc, le Sauveur nous recommande-t-il ici le précepte de l'amour comme le précepte spécial et unique, si ce n'est parce que tous les commandements ont pour but unique la charité, et qu'ils se réduisent tous à un seul, parce que tout précepte ne peut s'appuyer solidement que sur la charité? De même que toutes les branches de l'arbre sortent d'une seule racine, ainsi toutes les vertus sont produites par la charité, et les branches, figure des bonnes oeuvres, ne peuvent se couvrir de verdure, si elles ne sont unies à la racine de la charité. Les commandements du Seigneur sont nombreux et variés, quant à la diversité des oeuvres, mais ils se réduisent à un seul, si l'on considère la racine du la charité qui les produit. - S. Aug. (Traité 83 sur S. Jean). Là où est la charité, quelle chose peut nous manquer? mais si la charité n'existe pas, quelle compensation peut nous rester? Or, cette charité est distincte de l'amour que les hommes ont les uns pour les autres, en tant qu'ils sont hommes, et Notre-Seigneur prend soin d'établir cette distinction, eu ajoutant: «Comme je vous ai aimés». car dans quel dessein Jésus-Christ nous a-t-il aimés, si ce n'est pour nous faire régner avec lui dans les cieux? Aimons-nous donc les uns les autres pour lit même motif, afin que notre amour nous sépare de ceux dont l'amour réciproque n'a point pour fin l'amour de Dieu, et qui ne s'aiment pas véritablement. Ceux au contraire qui s'aiment les uns les autres pour tendre d'un commun accord à la possession de Dieu, s'aiment d'un amour véritable.

S. Grég. La grande et unique preuve d'amour, c'est d'aimer ceux qui nous sont contraires. C'est ainsi que la vérité elle-même, tout en souffrant le supplice ignominieux de la croix, donne à ses persécuteurs un témoignage touchant d'amour dans cette prière: «Mon Père, Pardonnez-leur, parce qu'ils ne savent ce qu'ils font»; (Lc 23) amour porté au plus haut degré, comm e il le dit lui-même: «Personne ne peut avoir un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis». Notre-Seigneur était venu mourir pour ses ennemis, et cependant il déclare qu'il doit donner sa vie pour ses amis, et il nous apprend ainsi que lorsque nous pouvons gagner nos ennemis par notre affection, nos persécuteurs eux-mêmes deviennent nos amis.

S. Aug. (Traité 84) Le Sauveur avait dit précédemment: «Voici mon commandement, c'est que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés», la conséquence de ce précepte se trouve exprimée dans la première Epître de saint Jean: «De même que Jésus-Christ a donné sa vie pour nous, nous devons aussi donner notre vie pour nos frères». (1Jn 3,16). C'est ce que les martyre ont fait dans leur ardent amour pour Jésus-Christ; aussi à la table de Jésus-Christ, nous n'en faisons pas mémoire comme des autres fidèles, en priant pour eux; mais nous les prions bien plutôt de nous obtenir la grâce de marcher sur leurs traces, car ils ont donné à leurs frères le témoignage d'amour qu'ils avaient reçu eux-mêmes de la table du Seigneur. - S. Grég. Mais comment celui qui, en temps de paix, ne peut sacrifier sa tunique pour Dieu, pourra-t-il donner sa vie lorsque viendra la persécution? Si donc la vertu de charité veut être invincible au moment de l'épreuve, il faut qu'en temps de paix elle se nourrisse et s'entretienne par l'exercice de la miséricorde.

S. Aug. (de la Trin., 8, 8). C'est par la seule et même vertu de charité que nous aimons Dieu et notre prochain, avec cette unique différence que nous aimons Dieu pour Dieu, et que nous aimons le prochain et nous-mêmes pour Dieu. Ou comprend donc que bien qu'il y ait deux préceptes de charité qui renferment toute la loi et les prophètes (c'est-à-dire l'amour de Dieu et l'amour du prochain), l'Ecriture cite souvent l'un pour l'autre, parce qu'en effet, celui qui aime Dieu, est disposé à faire ce que Dieu lui commande; il doit donc aimer un prochain pour obéir au commandement que Dieu lui en fait. Et c'est pou r cela que Notre-Seigneur ajoute: «Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande».

S. Grég. Un ami, amicus, est comme le gardien de l'âme, animi custos, et voilà pourquoi celui qui garde la volonté de Dieu en accomplissant ses préceptes, est appelé son ami. - S. Aug. (Traité 85 sur S. Jean). Quelle admirable condescendance ! comme on ne peut être bon serviteur si l'on n'accomplit les préceptes de son maître, il veut que le caractère spécial des bons serviteurs, soit aussi le signe distinctif de ses amis. Le bon serviteur peut donc à la fois être serviteur et ami. Mais comment comprendre que le bon serviteur puisse réunir à la fois les deux titres de serviteur et d'ami, le Sauveur l'explique lui-même: «Je ne vous appellerai plus serviteur, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître». Est-ce à dire que nous cesserons d'être serviteurs, parce que nous serons de bons serviteurs? Est-ce qu'un maître ne confie pas aussi sus secrets à un serviteur, dont il a mis la fidélité à l'épreuve? Je réponds qu'il y a deux sortes de servitudes, comme il y a deux sortes de craintes. Il y a la crainte que la charité parfaite bannit complètement du coeur (1Jn 4,18); et cette crainte entraîne avec elle la servitude qu'il faut mettre dehors avec la crainte; et il y a une autre crainte chaste et pure, celle qui demeure éternellement (Ps 18) Notre-Seigneur avait donc en vue ceux qui servent sous l'impression de la première servitude, lorsqu'il dit: «Je ne vous appellerai plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas», etc. Il ne veut point parler de ce serviteur animé d'une crainte chaste, et à qui son maître dit: «Courage, bon serviteur, entrez dans la gloire de votre Seigneur;» (Mt 24) mais du serviteur qui agit par ce sentiment de crainte que l'amour parfait chasse du coeur, et dont il est dit: «Le serviteur ne demeure pas toujours dans la maison, mais le fils y demeure éternellement». Puisque donc Dieu nous a donné le pouvoir d'être ses enfants (Jn 1), ne soyons plus serviteurs, soyons des enfants, de sorte que par une admirable transformation, nous soyons serviteurs sans être serviteurs; or, nous savons que c'est le Seigneur qui produit ce changement ineffable, tandis que le serviteur qui ne sait pas ce que fait son maître, l'ignore. Lorsqu'il fait quelque bien, il s'élève comme s'il en était l'unique auteur, et se glorifie en lui-même, plutôt que de renvoyer toute la gloire à son maître.

«Je vous ai appelés mes amis, parce que tout ce que j'ai entendu de mon Père, je vous l'ai fait connaître». - Théophyl. C'est-à-dire, le serviteur ne connaît pas les pensées de son maître, mais pour vous que je considère comme mes amis, je vous ai communiqué tous mes secrets. - S. Aug. (Traité 86 sur S. Jean). Mais dans quel sens devons-nous entendre qu'il a fait connaître à ses disciples tout ce qu'il a entendu dire à son Père? Il y a sans doute beaucoup de choses que le Sauveur n'a point dites à ses disciples, parce qu'ils n'étaient pas capables de les comprendre; mais il dit qu'il leur a fait connaître toutes les vérités qu'il sait leur devoir un jour révéler avec cette plénitude de science, dont saint Paul a dit: «Alors je connaîtrai comme je suis connu». (1Co 13,12). Car de même que nous attendons l'immortalité de la chair et le salut éternel de nos âmes, nous espérons également la révélation et la connaissance de toutes les vérités que le Fils unique a entendues de son Père. -
S. Grég. (hom. 27 sur les Evang). Ou bien, toutes ces choses qu'il a entendues de son Père, et qu'il a voulu faire connaître à ses serviteurs, ce sont les joies que la charité répand dans nos âmes, et les fêtes éternelles de la patrie céleste que Dieu imprime tous les jours dans nos coeurs par les aspirations de son amour, car l'amour que nous avons pour les biens célestes, nous en donne déjà la connaissance, parce que l'amour est lui-même une espèce de connaissance. Il leur a donc fait tout connaître, parce qu'il les avait arrachés à tous les désirs de la terre pour les faire brûler du feu de l'amour divin. - S. Chrys. (hom. 77 sur S. Jean). Ou bien encore, toutes ces vérités sont celles qu'ils devaient apprendre et savoir. Notre-Seigneur dit qu'il a entendu, et nous montre par-là qu'il ne dit rien qui ne soit entièrement conforme à la volonté de son Père.

S. Grég. Mais que celui qui parvient à cet honneur insigne d'être appelé l'ami de Dieu, se garde bien d'attribuer à ses mérites les dons célestes qu'il reçoit, car poursuit le Sauveur: «Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais c'est moi qui vous ai choisis». - S. Aug. (Tr. 86 sur S. Jean). Quelle grâce ineffable ! Qu'étions-nous, en effet, avant d'avoir choisi Jésus-Christ, si ce n'est des enfants d'iniquité et de perdition? Nous n'avions pas encore cru en lui, pour mériter par notre foi d'être choisis par lui, car s'il avait choisi ceux qui ont cru, il aurait donc choisi ceux qui déjà l'avaient choisi. Loin donc d'ici les vains raisonnements de ceux qui prétendent1 que nous avons été choisis avant la création du monde, parce que Dieu, dans sa prescience, avait prévu que nous serions bons, et non qu'il nous rendrait bons lui-même. En effet, s'il nous avait choisis, parce qu'il prévoyait que nous serions bons, il aurait également prévu que nous devions le choisir les premiers, car c'est la seule manière dont nous pouvions être bons, à moins qu'on n'appelle bon celui qui n'a pas choisi le bien. Qu'a-t-il donc pu choisir dans ceux qui n'avaient rien de bien? En effet vous ne pouvez dire: J'ai été choisi parce que je croyais déjà, car si vous croyiez alors en lui, c'est vous qui l'aviez choisi. Ne dites pas non plus: Avant de croire, je faisais déjà le bien, et j'ai mérité par-là d'être choisi, car quelle bonne oeuvre peut exister avant la foi? Que nous reste-t-il donc à dire? C'est que nous étions mauvais et que nous avons été choisis pour devenir bons par la grâce de celui qui nous a choisis. - S. Aug. (de la prédes. des saints, 17) Ils ont donc été élus avant la création du monde, en vertu de cette prédestination dans laquelle Dieu prévoyait tout ce qu'il devait faire, et nous avons été choisis du milieu du monde par suite de cette vocation qui réalisait la prédestination de Dieu, «car ceux qu'il a prédestinés, il les a appelés». (Rm 8)

S. Aug. (Traité 86 sur S. Jean). Remarquez donc bien qu'il ne choisissait pas ceux qui étaient bons, mais qu'il rendait bons ceux qu'il avait choisis: «Et je vous ai établis pour que vous alliez et que vous rapportiez du fruit». C'est ce fruit dont il avait dit plus haut: «Sans moi vous ne pouvez rien faire», car il est lui-même la voie dans laquelle il nous a placés pour que nous y marchions. - S. Grég. (hom. 27). Je vous ai établis (par ma grâce), je vous ai comme plantés afin que vous alliez (par la volonté qui est comme la marche pour l'âme), et que vous rapportiez du fruit (par les bonnes oeuvres). Il leur fait connaître quelle espèce de fruit ils doivent produire, lorsqu'il ajoute: «Et que votre fruit demeure». En effet, tous nos travaux pendant cette vie, peuvent à peine suffire à nos besoins jusqu'à la mort; et la mort vient d'un seul coup anéantir tout le fruit de notre travail sur la terre; mais les travaux qui ont pour objet la vie éternelle, survivent à la mort, et le fruit de ces travaux commence à paraître, lorsque le fruit des oeuvres charnelles est à jamais anéanti. Produisons donc de ces fruits qui demeurent et qui prennent naissance à la mort qui détruit et renverse tout. - S. Aug. Le fruit que nous devons produire, c'est donc l'amour qui n'est que dans le désir et ne jouit pas encore entièrement de son objet; et tout ce que nous demandons sous l'inspiration de ce désir au nom du Fils unique, nous est donné par le Père: «Et tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, il vous le donnera»; or, nous demandons au nom du Sauveur, lorsque nous demandons ce qui est utile au salut de notre âme.



Catena Aurea 13427