1998 Catéchisme 797

III L'Eglise - Temple de l'Esprit Saint

797 "Quod est spiritus noster, id est anima nostra, ad membra nostra, hoc est Spiritus Sanctus ad membra Christi, ad corpus Christi, quod est Ecclesia" (S. Augustin, serm. 267,4). "C'est à l'Esprit du Christ comme à un principe caché qu'il faut attribuer que toutes les parties du Corps soient reliées, aussi bien entre elles qu'avec leur Tête suprême, puisqu'il réside tout entier dans la Tête, tout entier dans le Corps, tout entier dans chacun de ses membres" (Pie XII, Enc. "Mystici Corporis": DS 3808). L'Esprit Saint fait de l'Eglise "le Temple du Dieu Vivant" (2Co 6,16 cf. ):

C'est à l'Eglise elle-même, en effet, qu'a été confié le 'Don de Dieu ... C'est en elle qu'a été déposée la communion avec le Christ, c'est-à-dire l'Esprit-Saint, arrhes de l'incorruptibilité, confirmation de notre foi et échelle de notre ascension vers Dieu ... Car là où est l'Eglise, là est aussi l'Esprit de Dieu; et là où est l'Esprit de Dieu, là est l'Eglise et toute grâce (S. Irénée, hær. 3,24,1).

798 L'Esprit Saint est "le Principe de toute action vitale et vraiment salutaire en chacune des diverses parties du Corps" (Pie XII, enc. "Mystici Corporis": DS 3808). Il opère de multiples manières l'édification du Corps tout entier dans la charité (cf. Ep 4,16): par la Parole de Dieu, "qui a la puissance de construire l'édifice" (Ac 20,32), par le Baptême par lequel il forme le Corps du Christ (cf. 1Co 12,13) par les sacrements qui donnent croissance et guérison aux membres du Christ; par "la grâce accordée aux apôtres qui tient la première place parmi ses dons" (LG 7), par les vertus qui font agir selon le bien, enfin par les multiples grâces spéciales (appelés "charismes") par lesquels il rend les fidèles "aptes et disponibles pour assumer les diverses charges et offices qui servent à renouveler et à édifier davantage l'Eglise" (LG 12 cf. AA 3).


Les charismes

799 Extraordinaires ou simples et humbles, les charismes sont des grâces de l'Esprit Saint qui ont, directement ou indirectement, une utilité ecclésiale, ordonnés qu'ils sont à l'édification de l'Eglise, au bien des hommes et aux besoins du monde.

800 Les charismes sont à accueillir avec reconnaissance par celui qui les reçoit, mais aussi par tous les membres de l'Eglise. Ils sont, en effet, une merveilleuse richesse de grâce pour la vitalité apostolique et pour la sainteté de tout le Corps du Christ; pourvu cependant qu'il s'agisse de dons qui proviennent véritablement de l'Esprit Saint et qu'ils soient exercés de façon pleinement conforme aux impulsions authentiques de ce même Esprit, c'est-à-dire selon la charité, vraie mesure des charismes (cf. 1Co 13).

801 C'est dans ce sens qu'apparaît toujours nécessaire le discernement des charismes. Aucun charisme ne dispense de la référence et de la soumission aux Pasteurs de l'Eglise. "C'est à eux qu'il convient spécialement, non pas d'éteindre l'Esprit, mais de tout éprouver pour retenir ce qui est bon" (LG 12), afin que tous les charismes coopèrent, dans leur diversité et leur complémentarité, au "bien commun" (1Co 12,7) (cf. LG 30
CL 24).



En bref

802 "Le Christ Jésus s'est livré pour nous afin de nous racheter de toute iniquité et de purifier un Peuple qui lui appartienne en propre" (Tt 2,14).

803 "Vous êtes donc une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un Peuple acquis" (1P 2,9).

804 On entre dans le Peuple de Dieu par la foi et le Baptême. "Tous les hommes sont appelés à faire partie du Peuple de Dieu" (LG 13), afin que, dans le Christ, "les hommes constituent une seule famille et un seul Peuple de Dieu" (AGD 1).

805 L'Eglise est le Corps du Christ. Par l'Esprit et son action dans les sacrements, surtout l'Eucharistie, le Christ mort et ressuscité constitue la communauté des croyants comme son Corps.

806 Dans l'unité de ce Corps, il y a diversité de membres et des fonctions. Tous les membres sont liés les uns aux autres, particulièrement à ceux qui souffrent, sont pauvres et persécutés.

807 L'Eglise est ce Corps dont le Christ est la Tête: elle vit de Lui, en Lui et pour Lui; Il vit avec elle et en elle.

808 L'Eglise est l'Epouse du Christ: Il l'a aimée et s'est livré pour elle. Il l'a purifiée par son sang. Il a fait d'elle la Mère féconde de tous les fils de Dieu.

809 L'Eglise est le Temple de l'Esprit Saint. L'Esprit est comme l'âme du Corps Mystique, principe de sa vie, de l'unité dans la diversité et de la richesse de ses dons et charismes.

810 "Ainsi l'Eglise universelle apparaît comme 'un Peuple qui tire son unité de l'unité du Père et du Fils et de l'Esprit Saint' (S. Cyprien)" (LG 4).



Paragraphe 3 L'Eglise est une, sainte, catholique et Papostolique

811 "C'est là l'unique Eglise du Christ, dont nous professons dans le symbole qu'elle est une, sainte, catholique et apostolique" (LG 8). Ces quatre attributs, inséparablement liés entre eux (cf. DS 2888), indiquent des traits essentiels de l'Eglise et de sa mission. L'Eglise ne les tient pas d'elle-même; c'est le Christ qui, par l'Esprit Saint, donne à son Eglise, d'être une, sainte, catholique et apostolique, et c'est Lui encore qui l'appelle à réaliser chacune de ces qualités.

812 Seule la foi peut reconnaître que l'Eglise tient ces propriétés de sa source divine. Mais leurs manifestations historiques sont des signes qui parlent aussi clairement à la raison humaine. "L'Eglise, rappelle le premier Concile du Vatican, en raison de sa sainteté, de son unité catholique, de sa constance invaincue, est elle-même un grand et perpétuel motif de crédibilité et une preuve irréfragable de sa mission divine" (DS 3013).



I L'Eglise est une


"Le Mystère sacré de l'Unité de l'Eglise" (UR 2)

813 L'Eglise est une de par sa source: "De ce mystère, le modèle suprême et le principe est dans la trinité des personnes l'unité d'un seul Dieu Père, et Fils, en 'l'Esprit Saint" (UR 2). L'Eglise est une de par son Fondateur: "Car le Fils incarné en personne a réconcilié tous les hommes avec Dieu par sa Croix, rétablissant l'unité de tous en un seul Peuple et un seul Corps" (). L'Eglise est une de par son "âme": "L'Esprit Saint qui habite dans les croyants, qui remplit et régit toute l'Eglise, réalise cette admirable communion des fidèles et les unit tous si intimement dans le Christ, qu'il est le principe de l'Unité de l'Eglise" (UR 2). Il est donc de l'essence même de l'Eglise d'être une:

Quel étonnant mystère! Il y a un seul Père de l'univers, un seul Logos de l'univers et aussi un seul Esprit Saint, partout identique; il y a aussi une seule vierge devenue mère, et j'aime l'appeler l'Eglise (S. ément d'Alexandrie, pæd. 1,6).

814 Dès l'origine, cette Eglise une se présente cependant avec une grande diversité qui provient à la fois de la variété des dons de Dieu et de la multiplicité des personnes qui les reçoivent. Dans l'unité du Peuple de Dieu se rassemblent les diversités des peuples et des cultures. Entre les membres de l'Eglise existe une diversité de dons, de charges, de conditions et de modes de vie; "au sein de la communion de l'Eglise il existe légitimement des Eglises particulières, jouissant de leurs traditions propres" (LG 13). La grande richesse de cette diversité ne s'oppose pas à l'unité de l'Eglise. Cependant, le péché et le poids de ses conséquences menacent sans cesse le don de l'unité. Aussi l'apôtre doit-il exhorter à "garder l'unité de l'Esprit par le lien de la paix" (Ep 4,3).

815 Quels sont ces liens de l'unité? "Par-dessus tout (c'est) la charité, qui est le lien de la perfection" (Col 3,14). Mais l'unité de l'Eglise pérégrinante est assurée aussi par des liens visibles de communion:

- la profession d'une seule foi reçue des Apôtres;
- la célébration commune du culte divin, surtout des sacrements;
- la succession apostolique par le sacrement de l'ordre, maintenant la concorde fraternelle de la famille de Dieu (cf. UR 2 LG 14 CIC 205).

816 "L'unique Eglise du Christ, ... est celle que notre Sauveur, après sa Résurrection, remit à Pierre pour qu'il en soit le pasteur, qu'il lui confia, à lui et aux autres apôtres, pour la répandre et la diriger... Cette Eglise comme société constituée et organisée dans le monde est réalisée dans ("subsistit in") l'Eglise catholique gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui" (LG 8):

Le Décret sur l'Ocuménisme du IIe Concile du Vatican explicite: "C'est, en effet, par la seule Eglise catholique du Christ, laquelle est 'moyen général de salut', que peut s'obtenir toute la plénitude des moyens de salut. Car c'est au seul collège apostolique, dont Pierre est le chef, que le Seigneur confia, selon notre foi, toutes les richesses de la Nouvelle Alliance, afin de constituer sur la terre un seul Corps du Christ auquel il faut que soient pleinement incorporés tous ceux qui, d'une certaine façon, appartiennent déjà au peuple de Dieu" (UR 3).


Les blessures de l'unité

817 De fait, "dans cette seule et unique Eglise de Dieu apparurent dès l'origine certaines scissions, que l'apôtre réprouve avec vigueur comme condamnables; au cours des siècles suivants naquirent des dissensions plus amples, et des communautés considérables furent séparées de la pleine communion de l'Eglise catholique, parfois de par la faute des personnes de l'une et de l'autre partie" (UR 3). Les ruptures qui blessent l'unité du Corps du Christ (on distingue l'hérésie, l'apostasie et le schisme (cf. CIC 751) ne se font pas sans les péchés des hommes:

Ubi peccata sunt, ibi est multitudo, ibi schismata, ibi hæreses, ibi discussiones. Ubi autem virtus, ibi singularitas, ibi unio, ex quo omnium credentium erat cor unum et anima una (Origène, hom. in Ez 9,1).

818 Ceux qui naissent aujourd'hui dans des communautés issues de telles ruptures "et qui vivent la foi au Christ, ne peuvent être accusés de péché de division, et l'Eglise catholique les entoure de respect fraternel et de charité ... Justifiés par la foi reçue au Baptême, incorporés au Christ, ils portent à juste titre le nom de chrétiens, et les fils de l'Eglise catholique les reconnaissent à bon droit comme des frères dans le Seigneur" (UR 3).

819 Au surplus, "beaucoup d'éléments de sanctification et de vérité" (LG 8) existent en dehors des limites visibles de l'Eglise catholique: "la parole de Dieu écrite, la vie de la grâce, la foi, l'espérance et la charité, d'autres dons intérieurs du Saint-Esprit et d'autres éléments visibles" (UR 3 cf. LG 15). L'Esprit du Christ se sert de ces Eglises et communautés ecclésiales comme moyens de salut dont la force vient de la plénitude de grâce et de vérité que le Christ a confié à l'Eglise catholique. Tous ces biens proviennent du Christ et conduisent à lui (cf. UR 3) et appellent par eux-mêmes "l'unité catholique" (LG 8).


Vers l'unité

820 L'unité, "le Christ l'a accordée à son Eglise dès le commencement. Nous croyons qu'elle subsiste de façon inamissible dans l'Eglise catholique et nous espérons qu'elle s'accroîtra de jour en jour jusqu'à la consommation des siècles" (UR 4). Le Christ donne toujours à son Eglise le don de l'unité, mais l'Eglise doit toujours prier et travailler pour maintenir, renforcer et parfaire l'unité que le Christ veut pour elle. C'est pourquoi Jésus lui-même a prié à l'heure de sa Passion, et il ne cesse de prier le Père pour l'unité de ses disciples: "... Que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient un en nous, afin que le monde croie que tu m'as envoyé" (Jn 17,21). Le désir de retrouver l'unité de tous les chrétiens est un don du Christ et un appel de l'Esprit Saint (cf. UR 1).

821
Pour y répondre adéquatement sont exigés:

- un renouveau permanent de l'Eglise dans une fidélité plus grande à sa vocation. Cette rénovation est le ressort du mouvement vers l'unité (cf.
UR 6);
- la conversion du coeur "en vue de vivre plus purement selon l'Evangile" (cf. UR 7), car c'est l'infidélité des membres au don du Christ qui cause les divisions;
- la prière en commun, car "la conversion du coeur et la sainteté de vie, unies aux prières publiques et privées pour l'unité des chrétiens, doivent être regardées comme l'âme de tout oecuménisme et peuvent être à bon droit appelées oecuménisme spirituel" (UR 8);
- la connaissance réciproque fraternelle (cf. UR 9);
- la formation oecuménique des fidèles et spécialement des prêtres (cf. UR 10);
- le dialogue entre les théologiens et les rencontres entre les chrétiens des différentes Eglises et communautés (cf. UR 4 UR 9 UR 11);
- la collaboration entre chrétiens dans les divers domaines du service des hommes (cf. UR 12).

822 Le souci de réaliser l'union "concerne toute l'Eglise, fidèles et pasteurs" (UR 5). Mais il faut aussi "avoir conscience que ce projet sacré, la réconciliation de tous les chrétiens dans l'unité d'une seule et unique Eglise du Christ, dépasse les forces et les capacités humaines" C'est pourquoi nous mettons tout notre espoir "dans la prière du Christ pour l'Eglise, dans l'amour du Père à notre égard, et dans la puissance du Saint-Esprit" (UR 24).



II L'Eglise est sainte

823 "L'Eglise ... est aux yeux de la foi indéfectiblement sainte. En effet le Christ, Fils de Dieu, qui, avec le Père et l'Esprit, est proclamé 'seul Saint', a aimé l'Eglise comme son épouse, il s'est livré pour elle afin de la sanctifier, il se l'est unie comme son Corps et l'a comblée du don de l'Esprit Saint pour la gloire de Dieu" (LG 39). L'Eglise est donc "le Peuple saint de Dieu" (LG 12), et ses membres sont appelés "saints" (cf. Ac 9,13 1Co 6,1 1Co 16,1).

824 L'Eglise, unie au Christ, est sanctifiée par Lui; par Lui et en Lui elle devient aussi sanctifiante. "Toutes les oeuvres de l'Eglise tendent comme à leur fin, à la sanctification des hommes dans le Christ et à la glorification de Dieu" (SC 10). C'est dans l'Eglise qu'est déposée "la plénitude des moyens de salut" (UR 3). C'est en elle que "nous acquérons la sainteté par la grâce de Dieu" (LG 48).

825 "Sur terre, l'Eglise est parée d'une sainteté véritable, bien qu'imparfaite" (LG 48). En ses membres, la sainteté parfaite est encore à acquérir: "Pourvue de moyens salutaires d'une telle abondance et d'une telle grandeur, tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur condition et leur état de vie, sont appelés par Dieu chacun dans sa route, à une sainteté dont la perfection est celle même du Père" (LG 11).

826 La charité est l'âme de la sainteté à laquelle tous sont appelés: "Elle dirige tous les moyens de sanctification, leur donne leur âme et les conduit à leur fin" (LG 42):

Je compris que si l'Eglise avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas, je compris que l'Eglise avait un Coeur, et que ce Coeur était brulant d'amour. Je compris que l'Amour seul faisait agir les membres de l'Eglise, que si l'Amour venait à s'éteindre, les Apôtres n'annonceraient plus l'Evangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang ... Je compris que l'Amour renfermait toutes les vocations, que l'amour était tout, qu'il embrassait tous les temps et tous les lieux ... en un mot, qu'il est éternel! (Ste. Thérèse de l'Enfant-Jésus, ms. autob. B 3v).

827 "Tandis que le Christ saint, innocent, sans tache, venu uniquement pour expier les péchés du peuple, n'a pas connu le péché, l'Eglise, elle, qui renferme des pécheurs dans son propre sein, est donc à la fois sainte et appelée à se purifier, et poursuit constamment son effort de pénitence et de renouvellement" (LG 8 cf. UR 3 UR 6). Tous les membres de l'Eglise, ses ministres y compris, doivent se reconnaître pécheurs (cf. 1Jn 1,8-10). En tous, l'ivraie du péché se trouve encore mêlée au bon grain de l'Evangile jusqu'à la fin des temps (cf. Mt 13,24-30). L'Eglise rassemble donc des pécheurs saisis par le salut du Christ mais toujours en voie de sanctification:

L'Eglise est sainte tout en comprenant en son sein des pécheurs, parce qu'elle n'a elle-même d'autre vie que celle de la grâce: c'est en vivant de sa vie que ses membres se sanctifient; c'est en se soustrayant à sa vie qu'ils tombent dans les péchés et les désordres qui empêchent le rayonnement de sa sainteté. C'est pourquoi elle souffre et fait pénitence pour ces fautes, dont elle a le pouvoir de guérir ses enfants par le sang du Christ et le don de l'Esprit Saint (SPF 19).

828 En canonisant certains fidèles, c'est-à-dire en proclamant solennellement que ces fidèles ont pratiqué héroïquement les vertus et vécu dans la fidélité à la grâce de Dieu, l'Eglise reconnaît la puissance de l'Esprit de sainteté qui est en elle et elle soutient l'espérance des fidèles en les leur donnant comme modèles et intercesseurs (cf. LG 40 LG 48-51). "Les saints et les saintes ont toujours été source et origine de renouvellement dans les moments les plus difficiles de l'histoire de l'Eglise" (CL 16,3). En effet, "la sainteté est la source secrète et la mesure infaillible de son activité apostolique et de son élan missionnaire" (CL 17,3).

829 "En la personne de la bienheureuse Vierge l'Eglise atteint déjà à la perfection qui la fait sans tache ni ride. Les fidèles du Christ, eux, sont encore tendus dans leur effort pour croître en sainteté par la victoire sur le péché: c'est pourquoi ils lèvent leurs yeux vers Marie" (LG 65): en elle, l'Eglise est déjà la toute sainte.



III L'Eglise est Catholique


Que veut dire "catholique"?

830 Le mot "catholique" signifie "universel" dans le sens de "selon la totalité" ou "selon l'intégralité". L'Eglise est catholique dans un double sens:

Elle est catholique parce qu'en elle le Christ est présent. "Là où est le Christ Jésus, là est l'Eglise Catholique" (S. Ignace d'Antioche, Smyrn. 8,2). En elle subsiste la plénitude du Corps du Christ uni à sa Tête (cf.
Ep 1,22-23), ce qui implique qu'elle reçoive de lui "la plénitude des moyens de salut" (AGD 6) qu'Il a voulus: confession de foi droite et complète, vie sacramentelle intégrale et ministère ordonné dans la succession apostolique. L'Eglise était, en ce sens fondamental, catholique au jour de la Pentecôte (cf. AGD 4) et elle le sera toujours jusqu'au jour de la Parousie.

831 Elle est catholique parce qu'elle est envoyée en mission par le Christ à l'universalité du genre humain (cf. Mt 28,19):

Tous les hommes sont appelés à faire partie du Peuple de Dieu. C'est pourquoi ce Peuple, demeurant un et unique, est destiné à se dilater aux dimensions de l'univers entier et à toute la suite des siècles pour que s'accomplisse ce que s'est proposé la volonté de Dieu créant à l'origine la nature humaine dans l'unité, et décidant de rassembler enfin dans l'unité ses fils dispersés... Ce caractère d'universalité qui brille sur le Peuple de Dieu est un don du Seigneur lui-même, grâce auquel l'Eglise catholique, efficacement et perpétuellement, tend à récapituler l'humanité entière avec tout ce qu'elle comporte de biens sous le Christ chef, dans l'unité de son Esprit (LG 13).


Chaque Eglise particulière est "catholique"

832 "L'Eglise du Christ est vraiment présente en tous les légitimes groupements locaux de fidèles qui, unis à leurs pasteurs, reçoivent, dans le Nouveau Testament, eux aussi, le nom d'Eglises ... En elles, les fidèles sont rassemblés par la prédication de l'Evangile du Christ, le mystère de la Cène du Seigneur est célébré ... Dans ces communautés, si petites et pauvres qu'elles puissent être souvent ou dispersées, le Christ est présent par la vertu de qui se constitue l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique" (LG 26).

833 On entend par Eglise particulière, qui est le diocèse (ou l'éparchie), une communauté de fidèles chrétiens en communion dans la foi et les sacrements avec leur évêque ordonné dans la succession apostolique (cf. CD 11 CIC 368-369). Ces Eglises particulières "sont formées à l'image de l'Eglise universelle; c'est en elles et à partir d'elles qu'existe l'Eglise catholique une et unique" (LG 23).

834 Les Eglises particulières sont pleinement catholiques par la communion avec l'une d'entre elles: l'Eglise de Rome "qui préside à la charité" (S. Ignace d'Antioche, Rm 1,1). "Car avec cette Eglise, en raison de son origine plus excellente doit nécessairement s'accorder toute Eglise, c'est-à-dire les fidèles de partout" (S. Irénée, hær. 3,3,2: repris par Cc. Vatican I: DS 3057). "En effet, dès la descente vers nous du Verbe incarné, toutes les Eglises chrétiennes de partout ont tenu et tiennent la grande Eglise qui est ici (à Rome) pour unique base et fondement parce que, selon les promesses mêmes du Sauveur, les portes de l'enfer n'ont jamais prévalu sur elle" (S. Maxime le Confesseur, opusc.).

835 "L'Eglise universelle ne doit pas être comprise comme une simple somme ou fédération d'églises particulières. Mais c'est bien plus l'Eglise, universelle par vocation et mission, qui prend racine dans une variété de terrains culturels, sociaux et humains, prenant dans chaque partie du monde des aspects et des formes d'expression diverses" (EN 62). La riche variété de disciplines ecclésiastiques, de rites liturgiques, de patrimoines théologiques et spirituels propres aux Eglises locales "montre avec plus d'éclat, par leur convergence dans l'unité, la catholicité de l'Eglise indivise" (LG 23).


Qui appartient à l'Eglise catholique?

836 "A l'unité catholique du Peuple de Dieu ... tous les hommes sont appelés; à cette unité appartiennent sous diverses formes ou sont ordonnés, et les fidèles catholiques et ceux qui, par ailleurs, ont foi dans le Christ, et finalement tous les hommes sans exception que la grâce de Dieu appelle au salut" (LG 13):

837 "Sont incorporés pleinement à la société qu'est l'Eglise ceux qui, ayant l'Esprit du Christ, acceptent intégralement son organisation et tous les moyens de salut institués en elle, et qui, en outre, grâce aux liens constitués par la profession de foi, les sacrements, le gouvernement ecclésiastique et la communion, sont unis, dans l'ensemble visible de l'Eglise, avec le Christ qui la dirige par le Souverain Pontife et les évêques. L'incorporation à l'Eglise, cependant, n'assure pas le salut pour celui qui, faute de persévérer dans la charité, reste bien 'de corps' au sein de l'Eglise, mais non 'de coeur'"(LG 14).

838 "Avec ceux qui, étant baptisés, portent le beau nom de chrétiens sans professer pourtant intégralement la foi ou sans garder l'unité de communion avec le successeur de Pierre, l'Eglise se sait unie pour de multiples raisons" (LG 15). "Ceux qui croient au Christ et qui ont reçu validement le Baptême, se trouvent dans une certaine communion, bien qu'imparfaite, avec l'Eglise catholique" (UR 3). Avec les Eglises orthodoxes, cette communion est si profonde "qu'il lui manque bien peu pour qu'elle atteigne la plénitude autorisant une célébration commune de l'Eucharistie du Seigneur" (Paul VI, discours 14 décembre 1975 cf. UR 13-18).


L'Eglise et les non-chrétiens

839 "Quant à ceux qui n'ont pas encore reçu l'Evangile, sous des formes diverses, eux aussi sont ordonnés au Peuple de Dieu" (LG 16):

Le rapport de l'Eglise avec le Peuple Juif. L'Eglise, Peuple de Dieu dans la Nouvelle Alliance, découvre, en scrutant son propre mystère, son lien avec le Peuple Juif (cf. NAE 4). "à qui Dieu a parlé en premier" (MR, Vendredi-Saint 13: oraison universelle VI). A la différence des autres religions non-chrétiennes la foi juive est déjà réponse à la révélation de Dieu dans l'Ancienne Alliance. C'est au Peuple Juif qu'"appartiennent l'adoption filiale, la gloire, les alliances, la législation, le culte, les promesses et les patriarches, lui de qui est né, selon la chair le Christ" (Rm 9,4-5) car "les dons et l'appel de Dieu sont sans repentance" (Rm 11,29).

840 Par ailleurs, lorsque l'on considère l'avenir, le peuple de Dieu de l'Ancienne Alliance et le nouveau Peuple de Dieu tendent vers des buts analogues: l'attente de la venue (ou du retour) du Messie. Mais l'attente est d'un côté du retour du Messie, mort et ressuscité, reconnu comme Seigneur et Fils de Dieu, de l'autre de la venue du Messie, dont les traits restent voilés, à la fin des temps, attente accompagnée du drame de l'ignorance ou de la méconnaissance du Christ Jésus.

841 Les relations de l'Eglise avec les Musulmans. "Le dessein de salut enveloppe également ceux qui reconnaissent le Créateur, en tout premier lieu les musulmans qui professent la foi d'Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, juge des hommes au dernier jour" (LG 16 cf. NAE 3).

842 Le lien de l'Eglise avec les religions non-chrétiennes est d'abord celui de l'origine et de la fin communes du genre humain:

En effet, tous les peuples forment une seule communauté; ils ont une seule origine, puisque Dieu a fait habiter toute la race humaine sur la face de la terre; ils ont aussi une seule fin dernière, Dieu, dont la providence, les témoignages de bonté et les desseins de salut s'étendent à tous, jusqu'à ce que les élus soient réunis dans la cité sainte (
NAE 1).

843 L'Eglise reconnaît dans les autres religions la recherche, "encore dans les ombres et sous des images", du Dieu inconnu mais proche puisque c'est Lui qui donne à tous vie, souffle et toutes choses et puisqu'il veut que tous les hommes soient sauvés. Ainsi, l'Eglise considère tout ce qui peut se trouver de bon et de vrai dans les religions "comme une préparation évangélique et comme un don de Celui qui illumine tout homme pour que, finalement, il ait la vie" (LG 16 cf. NAE 2 EN 53).

844 Mais dans leur comportement religieux, les hommes montrent aussi des limites et des erreurs qui défigurent en eux l'image de Dieu:

Bien souvent, trompés par le malin, ils se sont égarés dans leurs raisonnements, ils ont échangé la vérité de Dieu contre le mensonge, en servant la créature de préférence au Créateur ou bien vivant et mourant sans Dieu en ce monde, ils sont exposés à l'extrême désespoir (
LG 16).

845 C'est pour réunir de nouveau tous ses enfants que le péché a dispersés et égarés que le Père a voulu convoquer toute l'humanité dans l'Eglise de son Fils. L'Eglise est le lieu où l'humanité doit retrouver son unité et son salut. Elle est "le monde réconcilié" (S. Augustin, serm. 96,7,9). Elle est ce navire qui "pleno dominicæ crucis velo Sancti Spiritus flatu in hoc bene navigat mundo" (S. Ambroise, virg. 18,118); selon une autre image chère aux Pères de l'Eglise, elle est figurée par l'Arche de Noé qui seule sauve du déluge (cf. déjà 1P 3,20-21).


"Hors de l'Eglise point de salut"

846 Comment faut-il entendre cette affirmation souvent répétée par les Pères de l'Eglise? Formulée de façon positive, elle signifie que tout salut vient du Christ-Tête par l'Eglise qui est son Corps:

Appuyé sur la Sainte Ecriture et sur la Tradition, le Concile enseigne que cette Eglise en marche sur la terre est nécessaire au salut. Seul, en effet, le Christ est médiateur et voie de salut: or, il nous devient présent en son Corps qui est l'Eglise; et en nous enseignant expressément la nécessité de la foi et du Baptême, c'est la nécessité de l'Eglise elle-même, dans laquelle les hommes entrent par la porte du Baptême, qu'il nous a confirmée en même temps. C'est pourquoi ceux qui refuseraient soit d'entrer dans l'Eglise catholique, soit d'y persévérer, alors qu'ils la sauraient fondée de Dieu par Jésus-Christ comme nécessaire, ceux-là ne pourraient être sauvés (
LG 14).

847 Cette affirmation ne vise pas ceux qui, sans leur faute, ignorent le Christ et son Eglise:

En effet, ceux qui, sans faute de leur part, ignorent l'Evangile du Christ et son Eglise, mais cherchent pourtant Dieu d'un coeur sincère et s'efforcent, sous l'influence de sa grâce, d'agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, ceux-là peuvent arriver au salut éternel (
LG 16 cf. DS 3866-3872).

848 "Bien que Dieu puisse par des voies connues de lui seul amener à la foi 'sans laquelle il est impossible de plaire à Dieu' (He 11,6) des hommes qui, sans faute de leur part, ignorent l'Evangile, l'Eglise a le devoir en même temps que le droit sacré d'évangéliser" (AGD 7) tous les hommes.


La mission - une exigence de la catholicité de l'Eglise

849 Le mandat missionnaire. "Envoyée par Dieu aux nations pour être le sacrement universel du salut, l'Eglise, en vertu des exigences intimes de sa propre catholicité et obéissant au commandement de son fondateur est tendue de tout son effort vers la prédication de l'Evangile à tous les hommes" (AGD 1): "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours, jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,19-20).

850 L'origine et le but de la mission. Le mandat missionnaire du Seigneur a sa source ultime dans l'amour éternel de la Très Sainte Trinité: "De par sa nature, l'Eglise, durant son pèlerinage sur terre, est missionnaire, puisqu'elle-même tire son origine de la mission du Fils et de la mission du Saint-Esprit, selon le dessein de Dieu le Père" (AGD 2). Et but dernier de la mission n'est autre que de faire participer les hommes à la communion qui existe entre le Père et le Fils dans leur Esprit d'amour (cf. Jean-Paul II, RMA 23).

851 Le motif de la mission.. C'est de l'amour de Dieu pour tous les hommes que l'Eglise a de tout temps tiré l'obligation et la force de son élan missionnaire: "car l'amour du Christ nous presse ..." (2Co 5,14 cf. AA 6 RMA 11). En effet, "Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (1Tm 2,4). Dieu veut le salut de tous par la connaissance de la vérité. Le salut se trouve dans la vérité. Ceux qui obéissent à la motion de l'Esprit de vérité sont déjà sur le chemin du salut; mais l'Eglise à qui cette vérité a été confiée, doit aller à la rencontre de leur désir pour la leur apporter. C'est parce qu'elle croit au dessin universel de salut qu'elle doit être missionnaire.

852 Les chemins de la mission. "L'Esprit Saint est le protagoniste de toute la mission ecclésiale" (RMA 21). C'est lui qui conduit l'Eglise sur les chemins de la mission. Celle-ci "continue et développe au cours de l'histoire la mission du Christ lui-même, qui fut envoyé pour annoncer aux pauvres la Bonne Nouvelle; c'est donc par la même route qu'a suivi le Christ lui-même que, sous la poussée de l'Esprit du Christ, l'Eglise doit marcher, c'est-à-dire par la route de la pauvreté, de l'obéissance, du service et de l'immolation de soi jusqu'à la mort, dont il est sorti victorieux par sa résurrection" (AGD 5). C'est ainsi que "le sang des martyrs est une semence de chrétiens" (Tertullien, apol. 50).

853 Mais dans son pèlerinage l'Eglise fait aussi l'expérience de la "distance qui sépare le message qu'elle révèle et la faiblesse humaine de ceux auxquels cet Evangile est confié" (GS 43). Ce n'est qu'en avançant sur le chemin "de la pénitence et du renouvellement" (LG 8 cf. 15) et "par la porte étroite de la Croix" (AGD 1) que le Peuple de Dieu peut étendre le règne du Christ (cf. RMA 12-20). En effet, "comme c'est dans la pauvreté et la persécution que le Christ a opéré la Rédemption, l'Eglise elle aussi est appelée à entrer dans cette même voie pour communiquer aux hommes les fruits du salut" (LG 8).

854 Par sa mission même "l'Eglise fait route avec toute l'humanité et partage le sort terrestre du monde; elle est comme le ferment et, pour ainsi dire, l'âme de la société humaine appelée à être renouvelée dans le Christ et transformée en famille de Dieu" (GS 40). L'effort missionnaire exige donc la patience. Il commence par l'annonce de l'Evangile aux peuples et aux groupes qui ne croient pas encore au Christ (cf. RMA 42-47); il se poursuit dans l'établissement de communautés chrétiennes qui soient des "signes de la présence de Dieu dans le monde" (AGD 15), et dans la fondation d'Eglises locales (cf. RMA 48-49); il engage un processus d'inculturation pour incarner l'Evangile dans les cultures des peuples (cf. RMA 52-54); il ne manquera pas de connaître aussi des échecs. "En ce qui concerne les hommes, les groupes humains et les peuples, l'Eglise ne les atteint et ne les pénètre que progressivement, et les assume ainsi dans la plénitude catholique" (AGD 6).

855 La mission de l'Eglise appelle l'effort vers l'unité des chrétiens (cf. RMA 50). En effet "les divisions entre chrétiens empêchent l'Eglise de réaliser la plénitude de catholicité qui lui est propre en ceux de ses fils qui, certes, lui appartiennent par le Baptême, mais se trouvent séparés de sa pleine communion. Bien plus, pour l'Eglise elle-même, il devient plus difficile d'exprimer sous tous ses aspects la plénitude de la catholicité dans la réalité même de sa vie" (UR 4).

856 La tâche missionnaire implique un dialogue respectueux avec ceux qui n'acceptent pas encore l'Evangile (cf. RMA 55). Les croyants peuvent tirer profit pour eux-mêmes de ce dialogue en apprenant à mieux connaître "tout ce qui se trouvait déjà de vérité et de grâce chez les nations comme par une secrète présence de Dieu" (AGD 9). S'ils annoncent la Bonne Nouvelle à ceux qui l'ignorent, c'est pour consolider, compléter et élever la vérité et le bien que Dieu a répandus parmi les hommes et les peuples, et pour les purifier de l'erreur et du mal "pour la gloire de Dieu, la confusion du démon et le bonheur de l'homme" (AGD 9).




1998 Catéchisme 797