1996 Denzinger 2724


GREGOIRE XVI ; 2 février

183l - 1er juin


Réponse de la Sacré Pénitencerie à l'archevêque de Besançon, 5

juillet 1831.

L'autorité d'Alphonse de Liguori dans le domaine moral

2725
Question : Louis François Auguste, cardinal de Rohan-Chabot, archevêque de Besançon, s'efforce de promouvoir la sagesse et l'unité en matière de doctrine auprès de tous ceux qui, dans son diocèse, ont la charge des âmes ; étant donné que certains d'entre eux combattent et interdisent la théologie morale du bienheureux Alphonse M. de Liguori parce que trop relâchée, dangereuse pour le salut et contraire à la saine morale, il prie la Sacrée Pénitencerie de se prononcer, et lui soumet les doutes d'un professeur de théologie (à savoir Th. Gousset) pour qu'il y soit répondu.

2726
1. Un professeur de la sainte théologie peut-il soutenir et enseigner sûrement les positions qu'enseigne le bienheureux Alphonse de Liguori dans sa théologie morale?

2727
2. Ou un confesseur doit-il être inquiété si, dans l'exercice du saint tribunal de la pénitence, il suit les positions du bienheureux Alphonse de Liguori pour la seule raison que le Siège apostolique n'a rien trouvé dans ses oeuvres qui mériterait d'être censuré ?
Le confesseur dont il s'agit à propos de ce doute ne lit les oeuvres du bienheureux docteur que pour connaître exactement sa doctrine, sans examiner les données et les raisons sur lesquelles s'appuient les diverses positions ; il pense, au contraire, qu'il agit sûrement dès lors qu'il peut estimer avec prudence qu'une doctrine qui ne contient rien qui mériterait d'être censuré est saine, sûre, et aucunement contraire à la sainteté de l'Evangile.
Réponse (confirmée par le souverain pontife le 22 juillet 1831): Pour 1. Oui, sans qu'il faille considérer pour autant que ceux qui suivent les positions transmises par d'autres auteurs approuvés devraient être blâmés.
Pour 2. Non, compte tenu de l'intention du Saint-Siège au sujet de l'approbation des écrits du Serviteur de Dieu en vue de la canonisation.



Encyclique "Mirari vos arbitramur", 15 août 1832

Indifférentisme et rationalisme

2730
Nous en venons maintenant à une autre cause, très grosse de conséquences, de ces maux dont nous déplorons que l'Eglise soit présentement affligée, à savoir l'indifférentisme, ou cette opinion fausse... selon laquelle on pourrait obtenir le salut éternel de l'âme par n'importe quelle profession de foi dès lors que la conduite se réfère à la règle de ce qui est droit et honnête. Et de cette source empoisonnée de l'indifférentisme découle cette maxime fausse et absurde, ou plutôt ce délire, qu'il faut procurer et garantir à chacun la liberté de conscience.

2731
Et cette erreur proprement pestilentielle se voit aplanir la voie par cette liberté d'opinion complète et immodérée qui se répand de toutes parts pour la ruine de la communauté sacrée et de la communauté civile, et dont certains affirment avec la plus grande impudence qu'il en résulterait un avantage pour la religion. Mais "quelle mort est pire pour l'âme que la liberté d'errer?" disait Augustin...

2732
Entourez en premier lieu de votre affection paternelle ceux qui appliquent surtout leur esprit aux disciplines sacrées et aux questions philosophiques exhortez et conseillez-les pour qu'ils ne dérivent pas de façon imprudente du chemin de la vérité vers la voie des impies en se fiant aux seules forces de leur esprit. Qu'ils se souviennent que Dieu guide la sagesse et qu'il dirige les sages (voir
Sg 7,15), et qu'il est impossible d'apprendre Dieu sans Dieu qui par le Verbe enseigne aux hommes à connaître Dieu.

Bref "Dum acerbissimas" 26 septembre 1835

2738

Erreurs de Georg Hermes

(Certains théologiens) empoisonnent les études sacrées par des doctrines étrangères... et condamnables, et ils n'hésitent pas non plus à profaner le magistère d'enseignement public qu'ils détiennent dans les écoles et les académies, et à fausser le dépôt très sacré de la foi lui-même qu'ils se flattent de défendre.
Et parmi les maîtres d'une telle erreur on compte, en raison de sa renommée constante et presque universelle en Allemagne, Georg Hermes, puisque aussi bien il a dévié avec audace de la voie royale que toute la tradition et les saints Pères avaient aplanie en expliquant et en défendant les vérités de la foi, qu'il l'a même méprisée et condamnée avec orgueil, et qu'il trace la voie ténébreuse vers toutes sortes d'erreurs par le doute positif considéré comme la base de toute recherche théologique, et par le principe qu'il a établi et selon lequel la raison est la norme première et l'unique moyen par lequel l'homme peut atteindre la connaissance de la vérité surnaturelle. ...

2739
(il a été jugé que l'auteur dans ses) ouvrages assemble des choses absurdes et étrangères à la doctrine de l'Eglise catholique, surtout au sujet de la nature de la foi et de la règle de ce qui est à croire, au sujet de la sainte Ecriture, de la tradition, de la Révélation et du magistère de l'Eglise, au sujet des motifs de crédibilité, au sujet des arguments par lesquels il avait coutume d'appuyer et de confirmer l'existence de Dieu, au sujet de l'essence de Dieu lui-même, de sa sainteté, de sa justice, de sa liberté, de la fin qu'il poursuit dans ses oeuvres qui sont appelées "extérieures" par les théologiens, ainsi qu'au sujet de la nécessité de la grâce, de la distribution de celle-ci et des dons, l'octroi des récompenses et l'infliction des peines, au sujet de l'état des premiers parents, du péché originel et des capacités de l'homme déchu.

2740
et ils ont décidé que ces livres doivent être prohibés et condamnés parce qu'ils contiennent des doctrines et des propositions qui, selon le cas, sont fausses, téméraires, captieuses, conduisent au scepticisme et à l'indifférentisme, sont erronées, scandaleuses, injurieuses à l'égard des écoles catholiques, renversent la foi divine, sentent l'hérésie, et ont déjà été condamnées par l'Eglise à d'autres occasions.



Réponse du Saint-Office à l'évêque de Nice, 17 janvier 1838.

Usure

2743
Question (9 septembre 1837): Des pénitents qui, sur la base d'un titre légal, ont tiré un gain modeste d'un prêt et qui doutent dans leur conscience ou ont mauvaise conscience, peuvent-ils recevoir l'absolution sacramentelle sans qu'il leur soit imposé de (le) restituer, dès lors du moins qu'ils éprouvent une douleur sincère à cause du péché qu'ils ont commis dans le doute ou avec mauvaise conscience, et qu'ils sont disposés à se conformer avec une obéissance fidèle aux commandements du Saint-Siège?
Réponse Oui, dans la mesure du moins où ils sont disposés à se conformer aux commandements du Saint-Siège.



Constitution "In supremo apostolatus fastigio", 3 décembre 1839

Demande d'abolition de l'esclavage

2745
...Nous voyons qu'il fait partie de notre sollicitude pastorale de Nous efforcer de détourner totalement les fidèles du trafic inhumain des Nègres ou d'autres hommes quels qu'ils soient.
...Il en a existé, même parmi les fidèles, qui, aveuglés de façon infâme par le désir d'un lucre sordide, n'ont pas hésité à réduire en esclavage dans des contrées écartées et lointaines des Indiens, des Nègres, ou d'autres malheureux, ou, en organisant et en développant le trafic de ceux qui ont été capturés par d'autres, à aider ceux-là dans leurs agissements abominables.
Il est vrai que plusieurs pontifes romains de glorieuse mémoire, nos prédécesseurs, n'ont pas omis de blâmer sévèrement dans l'exercice de leur fonction la manière d'agir de ces hommes comme étant préjudiciable à leur salut spirituel et ignominieuse pour le nom chrétien ; ils ont vu clairement qu'il en résulte également que les peuples des non-croyants s'en trouvent toujours confirmés davantage dans la haine pour notre vraie religion.

2746
Certes, grâce à l'aide de Dieu, ces sanctions et ces mesures de nos prédécesseurs n'ont pas peu contribué à protéger les Indiens, et les autres qui ont été mentionnés, de la cruauté des envahisseurs ou de la cupidité des marchands chrétiens, mais non au point que ce Saint-Siège puisse se réjouir du plein succès de ses efforts à ce sujet, puisque au contraire le trafic des Nègres continue toujours d'être pratiqué, même si pour une part il s'est réduit.
C'est pourquoi, désireux d'éloigner cette infamie si grande de tous les territoires des chrétiens,... en vertu de l'autorité apostolique Nous avertissons tous les fidèles chrétiens, de toute condition, et Nous les conjurons instamment dans le Seigneur : que personne désormais n'ait l'audace de tourmenter injustement des Indiens, des Nègres et d'autres hommes de cette sorte, de les dépouiller de leurs biens ou de les réduire en esclavage, ou d'en aider ou d'en soutenir d'autres qui commettent de tels actes à leur égard, ou de pratiquer ce trafic inhumain par lequel des Nègres, qui ont été réduits en esclavage d'une manière ou d'une autre, comme s'ils n'étaient pas des hommes mais de purs et simples animaux, sont achetés et vendus sans aucune distinction en opposition aux commandements de la justice et de l'humanité, et condamnés à endurer les travaux parfois les plus durs...



Réponse de la Sacré Congrégation des indulgences, 28 juillet 1840.

L'efficacité de l'indulgence à un autel privilégié

2750
Question : Une indulgence liée à un autel privilégié doit-elle être entendue comme une indulgence plénière qui libère aussitôt l'âme de toutes les peines du purgatoire, ou seulement comme une indulgence qui est à appliquer selon la Bienveillance de la miséricorde divine?
Réponse : Si on considère l'intention de celui qui l'accorde et l'usage du pouvoir des clés, une indulgence liée à un autel privilégié doit être entendue comme une indulgence plénière qui libère aussitôt l'âme de toutes les peines du purgatoire ; mais si on considère l'effet de l'application, il faut la comprendre comme une indulgence dont la mesure correspond à la bienveillance de la miséricorde de Dieu et à l'acceptation par elle.




Thèses signées par Louis-Eugène Bautain à la demande de son évêque,

les 18 novembre 1835 et 8 septembre 1840

Thèse sur la foi et sur la raison contre le fidéisme

(thèses de 1840)

2751
1. Le raisonnement peut prouver avec certitude l'existence de Dieu et l'infinité de ses perfections. - La foi, don du ciel, suppose la révélation ; elle ne peut donc pas convenablement être alléguée vis-à-vis d'un athée en preuve de l'existence de Dieu
cf. 2812 .

2752
2. La divinité de la révélation mosaïque se prouve avec certitude par la tradition orale et écrite de la synagogue et du christianisme.

2753
3. La preuve tirée des miracles de Jésus Christ, sensible et frappante pour les témoins oculaires, n'a point perdu sa force avec son éclat vis-à-vis des générations subséquentes. Nous trouvons cette preuve en toute certitude dans l'authenticité du Nouveau Testament, dans la tradition orale et écrite de tous les chrétiens. C'est par cette double tradition que nous devons la démontrer à l'incrédule qui la rejette ou à ceux qui, sans l'admettre encore, la désirent.

2754
4. On n'a point le droit d'attendre d'un incrédule qu'il admette la résurrection de notre divin Sauveur, avant de lui en avoir administré des preuves certaines ; et ces preuves sont déduites par le raisonnement.

2755
5. Sur ces questions diverses, la raison précède la foi et doit nous y conduire
cf. 2813 .


2756
6. Quelque faible et obscure que soit devenue la raison par le péché originel il lui reste assez de clarté et de force pour nous guider avec certitude à l'existence de Dieu, à la révélation faite aux Juifs de Moïse, et aux chrétiens par notre adorable Homme-Dieu.



Réponse de la Sacrée Pénitencerie, 8 juin 1842

L'usage onaniste du mariage

2758
Questions : 1) Des époux qui usent du mariage de telle sorte qu'ils empêchent une conception, commettent-ils un acte qui par lui-même est moralement mauvais ?

2759
2) Si l'acte doit être considéré comme moralement mauvais, des époux qui ne s'en accusent pas peuvent-ils être considérés comme se trouvant dans cette bonne foi qui excuse du péché grave ?

2760
3) Doit-on approuver la façon de faire des confesseurs qui, pour ne pas blesser les époux, ne les interrogent pas sur la manière dont ils usent des droits du mariage ? ...Réponse : Pour 1) Etant donné que tout le désordre de l'acte procède de la malice de l'homme qui, au lieu de consommer l'acte, se retire et se répand en dehors du vase, dès lors qu'après les admonestations qui conviennent la femme n'aboutit à rien et que l'homme s'obstine en menaçant de coups ou de mort, elle pourra, comme l'enseignent des docteurs éprouvés, le permettre simplement sans péché, et cela pour une raison grave qui l'excuse ; car l'amour par lequel elle est tenue de l'empêcher ne l'oblige pas s'il comprend un tel préjudice. ...Pour 2) et 3)... que le confesseur se remémore cet adage : les choses saintes doivent être traitées saintement ; et qu'il considère également les paroles de saint Alphonse de Liguori, homme docte et très expert en ces questions, qui dit dans la Praxis confessariorum, (chap. I) Par. IV, n. 41 : "Pour ce qui est des péchés des époux concernant le devoir conjugal, le confesseur n'est pas tenu d'interroger dans le dialogue ordinaire, et cela ne convient pas, si ce n'est les épouses - et cela de la façon la plus réservée - pour savoir si elles l'ont accompli. Pour le reste, qu'il se taise, à moins d'être interrogé. De plus, qu'il n'omette pas de consulter d'autres auteurs éprouvés.



Réponse du Saint-Office 14 septembre 1842

La matière de l'onction des malades

2762
...Question : Un curé peut-il en cas de nécessité utiliser pour la validité du sacrement de l'extrême-onction de l'huile bénie par lui ? ...Réponse (confirmée par le souverain pontife) : Non, conformément à la version du décret (du Saint-Office) du 13 janvier 1611 (en présence de Paul V) :

2763
...Proposition : Le sacrement de l'extrême-onction peut être administré validement avec de l'huile qui n'a pas été consacrée par une bénédiction épiscopale : ...Déclaration du Saint-Office : La proposition est téméraire et proche de l'erreur.

Thèses signées par Louis-Eugène Bautain à la demande de la Sacrée Congrégation des évêques et des religieux, le 26 avril 1844.


La possibilité de démontrer les présupposés naturels de la

religion chrétienne et le rapport de celle-ci au

gouvernement civil.

2765
Nous promettons pour aujourd'hui et pour l'avenir :
1. de ne jamais enseigner que, avec les seules lumières de la droite raison, abstraction faite de la révélation divine, on ne puisse donner une véritable démonstration de l'existence de Dieu ;


2766
2. Qu'avec la raison seule on ne puisse démontrer la spiritualité et l'immortalité de l'âme, ou toute autre vérité purement naturelle, rationnelle ou morale ;


2767
3. qu'avec la raison seule on ne puisse avoir la science des principes ou de la métaphysique, ainsi que des vérités qui en dépendent, comme science tout à fait distincte de la théologie surnaturelle qui se fonde sur la révélation divine ;

2768
4. que la raison ne puisse acquérir une vraie et pleine certitude des motifs de crédibilité, c'est-à-dire de ces motifs qui rendent la Révélation divine évidemment croyable, tels que sont spécialement les miracles et les prophéties, et particulièrement la Résurrection de Jésus Christ ;



2769
5. que la relation chrétienne ne puisse s'adapter à toute forme légitime de gouvernement politique, tout en restant la même religion chrétienne et catholique, complètement indifférente à toutes les formes du régime politique, ne favorisant pas l'une plus que l'autre, et n'en excluant aucune.



Encyclique "Inter praecipuas machinationes", 8 mai 1844.


Traductions des Ecritures

2771
Vous n'ignorez pas enfin quelle diligence et quelle sagesse sont requises pour traduire fidèlement dans notre langue les paroles du Seigneur, puisque aussi bien rien ne se produit plus facilement que ces erreurs très graves introduites dans les traductions multipliées par les sociétés bibliques, et qui proviennent de la sottise et de la tromperie de tant de traducteurs ; et ces erreurs, le grand nombre même et la diversité de ces traductions les occultent pendant longtemps au détriment de beaucoup. A ces sociétés elles- mêmes il importe peu ou pas du tout qu'en lisant ces bibles traduites en langue vulgaire les hommes tombent dans telles erreurs plutôt que dans d'autres, pourvu qu'ils s'accoutument peu à peu à revendiquer pour eux-mêmes un libre jugement concernant le sens des Ecritures, à mépriser les traditions divines gardées dans l'Eglise sur la base de la doctrine des Pères, et à rejeter le magistère de l'Eglise elle-même.

2772
Dans les règles rédigées par des pères choisis par le concile de Trente et approuvées par Pie IV
1854 ..., et qui ont été placées en tête de l'Index des livres prohibés, on lit l'ordonnance munie d'une sanction générale selon laquelle les bibles en langue vulgaire ne doivent être permises qu'à ceux pour lesquels on estime que les lire sera au bénéfice de l'accroissement de leur foi et de leur piété. A cette règle, renforcée peu après par une nouvelle sauvegarde en raison des tromperies persistantes des hérétiques, fut ajoutée enfin, en vertu de l'autorité de Benoît XIV, cette déclaration selon laquelle désormais on considérera comme permise la lecture de traductions en langue vulgaire qui ont été approuvées par le Siège apostolique, ou qui ont été éditées avec des annotations tirées des saints Pères ou d'hommes savants et catholiques.



PIE IX : 16 juin

1846-7 février 1878


Encyclique "Qui Pluribus", 9 novembre 1846

L'erreur du rationalisme

2775
...(Vous savez que les ennemis du nom chrétien enseignent) que les mystères très saints de notre religion sont des imaginations et des inventions des hommes, et que la doctrine de l'Eglise catholique s'oppose au bien et aux intérêts de la société humaine
voir 2940 , et qu'ils ne craignent pas même de renier le Christ et Dieu. Et pour mieux tromper les peuples, et pour abuser ceux surtout qui sont imprudents et sans expérience, et pour les entraîner avec eux dans l'erreur ils prétendent qu'eux seuls connaissent les voies du bonheur et ils n'hésitent pas à s'arroger le titre de philosophes, comme si la philosophie, dont le propre est de rechercher la nature de la vérité, devait rejeter ce que Dieu lui-même, l'auteur suprême et très clément de toute la nature, a daigné manifester aux hommes dans sa bonté et sa miséricorde insignes, pour qu'ils obtiennent la vraie félicité et le salut.

2776
Par une argumentation déplacée et des plus fallacieuses, ils ne cessent d'en appeler à la force et à l'excellence de la raison humaine, de l'exalter contre la très sainte foi du Christ, et ils vont répétant avec une extrême audace que celle-ci s'oppose à la raison humaine
voir 2906 . On ne peut rien imaginer ni penser de plus fou, de plus impie, de plus contraire à la raison elle-même. Car, même si la foi est au-dessus de la raison, il ne peut jamais exister entre elles aucun dissentiment réel, aucune discorde, puisque toutes deux découlent d'une seule et même source de vérité immuable et éternelle, Dieu très bon et très grand, et qu'elles s'aident mutuellement, en sorte que la raison droite démontre, protège, défend la vérité de la foi, tandis que la foi libère la raison de toute erreur et, par la connaissance qu'elle a des choses divines, elle l'éclaire, la confirme et la parfait magnifiquement.

2777
C'est par une tromperie aussi grande, vénérables frères, que ces ennemis de la Révélation divine, qui décernent les plus hautes louanges au progrès humain, veulent, avec une audace vraiment téméraire et sacrilège, l'introduire dans la religion catholique, comme si la religion n'était pas l'oeuvre de Dieu, mais celle des hommes ou quelque trouvaille philosophique que des procédés humains puissent perfectionner
voir 2905 . ...Sur ces hommes qui délirent si misérablement, tombe avec beaucoup de justesse le reproche qu'à juste titre Tertullien faisait de son temps aux philosophes "qui ont présenté un christianisme stoïcien, platonicien, dialectique". Or comme notre très sainte religion n'est pas une invention de la raison humaine, mais une révélation faite très gracieusement par Dieu aux hommes, il est très facile à quiconque de comprendre qu'elle acquiert toute sa force de l'autorité de Dieu qui parle, et qu'elle ne peut jamais être déduite ou rendue plus parfaite par la raison humaine.

Le vrai rapport entre la raison humaine et la foi

2778
Pour ne pas se tromper ni errer dans une question aussi importante, la raison humaine doit s'enquérir diligemment sur le fait de la Révélation, pour savoir avec certitude que Dieu a parlé et pour lui rendre, comme l'enseigne très sagement l'Apôtre, "un hommage conforme à la raison"
Rm 12,1. Qui donc ignore ou peut ignorer qu'il faut avoir une confiance totale en Dieu quand il parle, et que rien n est plus conforme à la raison elle-même que d'acquiescer à ce qu'elle aura reconnu comme révélé par Dieu, qui ne peut ni se tromper ni nous tromper ?

2779
(Motifs de crédibilité de la religion chrétienne) Combien nombreux, admirables, splendides sont les arguments qui doivent très nettement convaincre la raison que la religion chrétienne est divine, et que "le principe de nos dogmes s'enracine en haut, dans le Seigneur des cieux", que dès lors rien n'est plus certain que notre foi, rien n'est plus sûr ; rien n'est plus saint, rien ne repose sur des principes plus fermes.
Cette foi, maîtresse de vie, guide du salut, qui chasse les vices et qui, en mère féconde, fait naître et nourrit les vertus, a été confirmée par la naissance, la vie, la mort, la résurrection, la sagesse, les prodiges et les prophéties de celui qui en est l'auteur divin et qui l'a accomplie, Jésus Christ ; resplendissant partout de la lumière de la doctrine d'en haut, enrichie des trésors de la richesse céleste, brillant au plus haut point d'un éclat remarquable par la prédication de tant de prophètes, par la splendeur de tant de miracles, par la constance de tant de martyrs, par la gloire de tant de saints, elle publié les lois salutaires du Christ ; et acquérant chaque jour des forces plus grandes au sein des plus cruelles persécutions, elle a envahi l'univers entier, les terres et les mers, du levant au couchant, grâce au seul étendard de la croix ; ayant anéanti les mensonges des idoles, dissipé l'obscurité des erreurs, triomphé de toute espèce d'ennemis, elle a éclairé de la lumière de la connaissance divine tous les peuples, toutes les nations, toutes les races, si cruellement barbares qu'ils fussent, si divers dans leur tempérament, leurs moeurs, leurs lois, leurs institutions, et elle les a soumis au joug très doux du Christ en annonçant à tous la paix, en leur annonçant le bonheur
Is 52,7. Tous ces faits font si fortement resplendir l'éclat de la sagesse et de la puissance divines, que l'esprit et la pensée de chacun peuvent facilement comprendre que la foi chrétienne est l'oeuvre de Dieu.

2780
(Obligation de croire). C'est pourquoi la raison humaine, qui connaît clairement et nettement par ces preuves très lumineuses et très fermes que Dieu est l'auteur de la foi, ne peut progresser davantage, mais rejetant et repoussant toute espèce de difficulté ou de doute, elle doit lui rendre l'hommage de la foi, puisqu'elle a la certitude que c'est Dieu qui a transmis tout ce que la foi propose aux hommes de croire et de faire.

L'infaillibilité du pape

2781
On voit par là dans quelle grande erreur se trouvent aussi ceux qui, abusant de la raison, et considérant les paroles de Dieu comme une oeuvre humaine, osent les expliquer à leur gré et les interpréter de façon téméraire, alors que Dieu lui-même a établi une autorité vivante pour enseigner et établir le sens vrai et légitime de sa révélation céleste, et pour dirimer par un jugement infaillible toutes les controverses en matière de foi et de moeurs, afin que les fidèles ne soient pas entraînés dans les pièges de l'erreur par tout vent de doctrine tenant à la malice des hommes
Ep 4,14.
Or cette autorité vivante et infaillible n'existe que dans l'Eglise qui a été édifiée par le Christ, le Seigneur, sur Pierre, tête de toute l'Eglise, son prince et son pasteur, dont il a promis que la foi ne défaillira jamais, et qui a toujours ses pontifes légitimes qui tiennent leur origine de Pierre lui-même, qui sont établis sur sa chaire, et sont aussi les héritiers et les garants de sa doctrine, de son honneur et de son pouvoir.
Et parce que là où est Pierre, là est l'Eglise, et que Pierre parle par le pontife romain, vit toujours dans ses successeurs, exerce le jugement et présente la vérité de la foi à ceux qui cherchent, pour cette raison les paroles divines doivent être reçues dans le même sens qu'a tenu et que tient cette chaire romaine du très bienheureux Pierre qui, mère et maîtresse de toutes les Eglises 1616 , a toujours gardé intègre et inviolée la foi reçue du Christ Seigneur, et l'a enseignée fidèlement en montrant à tous le chemin du salut et la doctrine de la vérité non corrompue.

Autres erreurs de ce temps

2782
Mais vous connaissez bien aussi, vénérables frères, d'autres erreurs monstrueuses et tromperies par lesquelles les fils de ce siècle s'efforcent de combattre avec violence la religion catholique et l'autorité de l'Eglise, ainsi que ses lois, et de fouler aux pieds les droits du pouvoir sacré aussi bien que du pouvoir civil.

2783
En font partie... ces sectes clandestines qui sont sorties des ténèbres pour la ruine et la dévastation aussi bien de la communauté sacrée que de la communauté publique, et qui ont été frappées d'anathème par les pontifes romains, nos prédécesseurs, dans leurs lettres apostoliques que nous confirmons avec la plénitude de notre autorité apostolique...

2784
C'est ce que veulent les très rusées sociétés bibliques qui, renouvelant l'artifice ancien des hérétiques, traduisent les livres des écrits divins dans toutes les langues vulgaires, contre les règles de la très sainte Eglise, les interprètent à l'aide d'explications souvent perverses, et ne cessent de les distribuer gratuitement, de les imposer à toute sorte de personnes, même aux moins cultivées, de sorte que rejetant la tradition divine, la doctrine des Pères et l'autorité de l'Eglise catholique, tous les interprètent selon leur jugement privé, en détournent leur sens, et tombent ainsi dans les plus grandes erreurs. Ces sociétés... Grégoire XVI... les a réprouvées, et Nous voulons de même qu'elles soient condamnées.

2785
En fait partie le système épouvantable, et même profondément contraire à la lumière naturelle de la raison et même, de l'indifférence de toute religion (indifférentisme), par lequel ces fourbes, après avoir supprimé toute distinction entre vertu et vice, vérité et erreur, honnêteté et turpitude, prétendent que les hommes peuvent obtenir le salut éternel dans le culte de n'importe quelle religion..., en fait partie la doctrine exécrable, et même profondément contraire au droit naturel lui-même, de ce qu'ils appellent le communisme, qui, une fois admise, conduirait à renverser de fond en comble les droits, les biens, les propriétés de tous, ainsi que la société humaine elle- même.



Décret du Saint-Office, 21 mai 1851

Usage onaniste du mariage

2791
Question : Quelle note doit être donnée aux trois propositions suivantes :
1. Pour des raisons honnêtes il est permis aux époux d'user du mariage de la manière dont en a usé Onan
Gn 38,8 s.

2792
2. Il est probable que cet usage du mariage n'est pas prohibé par le droit naturel.

3. Il n'est jamais expédient d'interroger les époux des deux sexes à ce sujet, même si prudemment on peut craindre que les époux, soit l'homme, soit la femme, abusent du mariage.
Réponse : Pour 1. Scandaleuse, erronée, et contraire au droit naturel du mariage.
Pour 2. Scandaleuse, et déjà condamnée implicitement à une autre occasion par Innocent XI, proposition 49
2149 . ...Pour 3. Telle qu'elle se présente, la proposition est fausse, trop relâchée, et dangereuse dans la pratique.

2795
Question 1) L'usage non accompli du mariage, qu'il s'effectue de façon onaniste ou de façon condomistique (c'est-à-dire en utilisant un instrument impie communément appelé "condom"), comme dans le présent cas, est-il licite ? ...2) Une femme qui en a connaissance peut-elle se livrer de façon passive à une union condomistique ? ...Réponse (décret du 6, publié le 19 avril) : Pour 1) Non la chose est en effet intrinsèquement mauvaise. ...Pour 2) Non ; elle participerait en effet à une chose intrinsèquement illicite.



Bulle "Ineffabilis Deus", 8 décembre 1854

L'éminence de Marie en général

2800
Le Dieu ineffable... a élu depuis le commencement et avant les siècles pour son Fils unique, et lui a destiné une mère de laquelle, ayant pris chair, il naîtrait lors de la bienheureuse plénitude des temps, et il lui a manifesté un tel amour au-dessus de toutes les créatures qu'il mit en elle, d'une manière singulière, ses plus grandes complaisances. C'est pourquoi, puisant dans le trésor de sa divinité, il la combla bien plus que tous les esprits angéliques et que tous les saints, de l'abondance de toutes les grâces célestes, et avec une telle profusion que, toujours exempte de toute tache du péché, toute belle et parfaite, elle manifesta une telle plénitude d'innocence et de sainteté qu'on ne peut, au-dessous de Dieu, en concevoir de plus grande, et qu'excepté Dieu, personne ne peut la concevoir en pensée.

2801
Et certes il convenait bien qu'elle resplendît toujours de l'éclat de la sainteté la plus parfaite, et qu'entièrement préservée même de la tache du péché originel, elle remportât ainsi le triomphe le plus complet sur l'antique serpent ; elle, la mère si vénérable à qui Dieu le Père avait résolu de donner son Fils unique, engendré de son coeur, qui est égal à lui et qu'il aime comme lui-même, de telle manière que par nature il fût un même unique et commun Fils de Dieu et de la Vierge ; elle que le Fils de Dieu lui-même avait choisie pour en faire substantiellement sa mère, et dans le sein de laquelle l'Esprit Saint avait voulu et opéré que fût conçu et naquît celui dont il procède lui- même.

Le caractère homogène du développement du dogme

2802
En effet l'Eglise du Christ, gardienne et protectrice des dogmes dont elle a reçu le dépôt, n'y change jamais rien, n'en retranche jamais rien ; mais ce qui est ancien, qui a pris forme aux temps anciens et que la foi des Pères a semé, elle met tout son soin à le polir et à l'affiner de manière que ces anciens dogmes de la doctrine céleste reçoivent l'évidence, la lumière, la distinction, tout en gardant leur plénitude, leur intégrité, leur caractère propre, et qu'ils croissent seulement selon leur genre, c'est-à-dire dans la même doctrine, dans le même sens, dans la même pensée.

Définition de l'Immaculée Conception de Marie

2803
Pour l'honneur de la sainte et indivisible Trinité, pour la gloire et l'ornement de la Vierge Mère de Dieu, pour l'exaltation de la foi catholique et l'accroissement de la religion chrétienne, par l'autorité de notre Seigneur Jésus Christ, des bienheureux apôtres Pierre et Paul et la Nôtre,
Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine
qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout- puissant, en vue des mérites de Jésus Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu, et qu'ainsi elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles.

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C'est pourquoi, s'il en était, ce qu'à Dieu ne plaise, qui eussent la présomption d'avoir des sentiments contraires à ce que nous venons de définir, qu'ils sachent très clairement qu'ils se condamnent eux-mêmes par leur propre jugement, qu'ils ont fait naufrage dans la foi et se sont séparés de l'unité de l'Eglise, et que, de plus, par le fait même, ils encourent les peines portées par le droit s'ils osent manifester par parole, par écrit ou par quelque signe extérieur, ce qu'ils pensent intérieurement.




1996 Denzinger 2724