1978 Mutuae-relationes 51


Chapitre VII

IMPORTANCE D'UNE COORDINATION OPPORTUNE

La vitalité variée et féconde des Eglises réclame un véritable engagement de coordination pour renouveler, créer et perfectionner les multiples instruments pastoraux de service et d'animation. Nous les examinerons aux divers niveaux: diocésain, national, universel.

Au niveau diocésain

52 - Dans chaque Diocèse, à travers son troupeau et d'une manière plus particulière à travers les personnes et les familles religieuses, qui y sont présentes, l'Evêque cherche à comprendre ce que l'Esprit veut manifester. Il est donc nécessaire qu'il entretienne des rapports sincères et familiers avec les Supérieurs pour mieux remplir son ministère de pasteur envers les Religieux et les Religieuses (cf. CD 15 CD 16) . C'est en effet son office spécifique de défendre la vie consacrée, de promouvoir et d'animer la fidélité et l'authenticité des Religieux, de les aider à s'insérer selon leur charisme propre, dans la communion et l'action évangélisatrice de l'Eglise. Dans cette tâche, l'Evêque agira naturellement en solidarité avec la Conférence Episcopale et en harmonie avec le Chef du Collège Apostolique.
De leur coté, les Religieux considéreront l'Evêque non seulement comme le Pasteur de toute la communauté diocésaine, mais aussi comme le garant de la fidélité à leur vocation dans l'accomplissement de leur service pour le bien de l'Eglise locale. «Ils se prêteront promptement et fidèlement aux requêtes et aux désirs des Evêques leur demandant de prendre une part plus large au ministère du salut des hommes; ils le feront cependant dans le respect du caractère de leur Institut, et conformément à leurs Constitutions» (CD 35,1) .

53 - Ils auront toujours présentes à l'esprit les dispositions suivantes du motu proprio «Ecclesiae Sanctae»:
«1 - Tous les Religieux, même exempts, sont soumis, dans leurs différentes oeuvres, aux lois, décrets et ordonnances portées par l'Ordinaire du lieu, pour ce qui est de l'exercice de l'apostolat ainsi que de l'action pastorale et sociale prescrite ou recommandée par l'Ordinaire du lieu.
2 - Ils sont également soumis aux lois, décrets et ordonnances portées par l'Ordinaire du lieu ou par la Conférence épiscopale ou, selon les lieux, par le Synode patriarcal (cf.
CD 35,5) lois qui regardent les divers éléments indiqués» (ES, I, 25, 1-2, a, b, c, d).

54 - Il est convenable d'établir dans les Diocèses l'office de Vicaire Episcopal pour les Religieux et les Religieuses, en vue d'aider dans ce secteur le ministère pastoral lui-même de l'Evêque (cf. Partie,Partie, chap. III), charge qui n'assume d'ailleurs aucun des rôles d'autorité propres aux Supérieurs. Il reviendra à chaque résidentiel de déterminer clairement les attributions spécifiques de cette fonction et, après une étude attentive, de la confier à une personne compétente, qui connaisse à fond la vie religieuse, l'apprécie et souhaite son développement.
En ce qui concerne l'accomplissement de cet office, il est recommandé de faire intervenir de manière opportune (par exemple comme consulteurs ou sous un autre titre de ce genre), les diverses catégories de religieux: prêtres, confrères laïcs et religieuses munis des qualités nécessaires.
Le mandat de Vicaire Episcopal pour les Congrégations religieuses consiste donc à aider l'Evêque dans l'accomplissement d'une tâche qui lui est propre et exclusive et qui consiste à prendre soin de la vie religieuse du diocèse, et à l'insérer dans le complexe de l'activité pastorale. Il apparait souhaitable, en conséquence, que l'Evêque consulte avec prudence les religieux et les religieuses pour le choix du candidat.

55 - Afin de permettre au Presbytérium du diocèse de manifester son unité et de mieux assurer les divers ministères, l'Evêque exhortera vivement les prêtres diocésains à reconnaître avec gratitude l'apport fructueux des Religieux à leur Eglise, et à approuver de bon gré la désignation de ceux-ci pour des tâches de responsabilité plus ample, qui soient en harmonie avec leur vocation et leur compétence.

56 - On s'emploiera à ce que les Religieux prêtres fassent partie des conseils presbytéraux d'une manière adéquate, on veillera également à ce que les Religieux, prêtres et laïcs, et les Religieuses, soient représentés équitablement dans les conseils pastoraux (cf. PO 7 CD 27 ES, I, 15 et 16). L'Evêque du lieu établira opportunément les critères et les moyens nécessaires pour déterminer équitablement la proportion des représentants dans ces conseils.

57 - Pour favoriser une certaine stabilité de la coopération pastorale,
a) On tiendra compte de la différence qui existe entre les «oeuvres propres» d'un Institut et celles qui lui sont «confiées» par l'Ordinaire du lieu. Les premières dépendent des Supérieurs religieux aux normes de leurs Constitutions, même si pour la pastorale elles sont sujettes à la juridiction de l'Ordinaire du lieu aux normes du droit (cf. ES, I, 29).
b) Pour toute oeuvre d'apostolat confiée par l'Ordinaire du lieu à un Institut, toutes les autres prescriptions du droit étant observées, on établira une convention écrite entre l'Ordinaire et le Supérieur compétent de l'Institut, dans laquelle sera précisé, entre autres tout ce qui concerne l'accomplissement de l'oeuvre, les religieux qui y seront employés et les questions financières (ES, I, 30, 1).
c) Pour ces oeuvres, le Supérieur religieux choisira des religieux vraiment capables, en s'entendant auparavant avec l'Ordinaire du lieu et, s'il s'agit d'une charge ecclésiastique à conférer à un religieux, celui-ci doit être nommé par l'Ordinaire du lieu lui-même, sur la présentation ou du moins avec le consentement de son Supérieur pour un certain temps fixé d'un commun accord (ES, I, 30, 2).

58 - La faculté de modifier les dispositions d'une manière plus adaptée à d'urgentes exigences de rénovation des Instituts restant sauve, il semble opportun de déterminer en priorité avec précision les oeuvres et surtout les charges à confier à des religieux déterminés, pour lesquelles une convention écrite est nécessaire, comme par exemple pour les curés (cf. ES, I, 33), les doyens, les vicaires épiscopaux, les assistants d'Action Catholique, les secrétaires d'action pastorale, les directeurs diocésains, les professeurs d'Université Catholique, les catéchistes professionnels, les directeurs de collèges catholiques, etc., en vue de la stabilité des titulaires et de la dévolution des biens en cas de suppression d'une oeuvre.
Si un religieux doit être démis de la charge qui lui a été confiée, on observera la disposition suivante: «Pour une cause grave tout religieux peut être démis de sa charge, tant au gré de l'autorité qui la lui a confiée, son supérieur étant averti, qu'au gré du supérieur, celui qui a confié l'oeuvre étant averti, avec un droit égal, sans avoir à demander le consentement de l'autre, sans avoir à indiquer à l'autre, et encore moins à lui prouver, les motifs de sa décision, étant sauf le recours dévolutif au Siège apostolique» (ES, I, 32).

59 - Les associations de Religieux et de Religieuses au niveau diocésain se révèlent très utiles, c'est pourquoi, compte tenu de leur caractère et de leur finalité spécifique, elles seront encouragées
a) soit comme organismes de liaison mutuelle, de promotion et de rénovation de la vie religieuse dans la fidélité aux directives du Magistère ecclésiastique et le respect du caractère propre de chaque Institut;
b) soit comme organismes pour discuter les «problèmes mixtes» entre Evêques et Supérieurs, ainsi que pour coordonner les activités des familles religieuses avec l'action pastorale du diocèse sous l'autorité de l'Evêque, sans préjudicier aux relations et tractations menées entre l'Evêque et les divers Instituts.

Au niveau des nations, des régions et des rites

60 - Dans les Conférences épiscopales d'une nation ou d'un territoire (cf. CD 37) , les Evêques «exercent conjointement leur ministère pastoral pour faire progresser le bien que l'Eglise offre aux hommes» (CD 38) . De la même manière, les Synodes Patriarcaux (cf. DE, 9) exercent leur ministère pour leur rite propre et les Assemblées interrituelles des Ordinaires (cf. CD 38) selon leur composition particulière, pour les relations entre les divers rites.

61 - Dans bon nombre de nations ou de territoires, par les soins de la Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers et, dans les territoires dépendant des Sacrées Congrégations pour l'Evangélisation des Peuples et pour les Eglises Orientales, avec le consentement du Sacré Dicastère concerné le Saint-Siège a institué les Conseils ou Conférences de Supérieurs Majeurs (de Religieux, de Religieuses ou mixtes). Ces conseils doivent être très respectueux de la diversité des Instituts, développer leur consécration commune, et diriger vers la coordination pastorale des Evêques les forces de tous ceux qui sont engagés dans le travail apostolique (cf. n. 21).
Afin que les Conseils des Supérieurs Majeurs puissent réaliser efficacement leur tâche, il sera très utile que, périodiquement, ils effectuent une révision de leur activité et que d'une manière adéquate, on organise en harmonie avec les diverses missions des Instituts, une répartition convenable des Commissions ou d'organismes analogues, dûment reliés aux Conseils de Supérieurs Majeurs.

62 - Les relations entre les Conseils de Supérieurs Majeurs et les Synodes Patriarcaux, et les relations des mêmes Conseils de Supérieurs Majeurs avec les Conférences Episcopales, ainsi que les Assemblées interrituelles, seront réglées selon les critères qui déterminent les rapports entre les divers Instituts et l'Ordinaire du lieu (cf. ES, 1, 23-25, 40); on établira ensuite les normes additives selon les exigences régionales.

63 - Il est très important que les Conseils des Supérieurs Majeurs collaborent diligemment et avec confiance avec les Conférences Episcopales (cf. CD 35,5 AGD 33) , il est donc «souhaitable que les questions concernant les deux parties soient traitées dans des commissions mixtes composées d'Evêques et de Supérieurs Majeurs» (ES, I, 43), ou selon d'autres formes selon la situation des Continents, des Nations ou des Régions.
Une commission mixte de ce genre devra être structurée de telle sorte qu'elle puisse remplir effectivement sa mission d'organisme de conseil réciproque, de liaison, de communication mutuelle, d'étude et de réflexion, même si le droit de décider en dernier ressort doit être laissé aux Conseils et aux Conférences, selon leur compétence respective.
Il incombe donc aux Pasteurs de promouvoir dans leurs diocèses la coordination de toutes les oeuvres et activités apostoliques, comme aux Synodes Patriarcaux et aux Conférences Episcopales dans leur territoire propre (cf. CD 36,5) .
Pour les questions concernant les Religieux, si la nécessité ou l'utilité le requièrent comme cela s'est produit en divers lieux les Evêques institueront une commission appropriée au sein de la Conférence Episcopale. La présence d'une telle commission ne constitue pas un obstacle au fonctionnement de la commission mixte, elle la réclame plutôt.

64 - La participation des Supérieurs Majeurs ou, selon les Statuts, de leurs délégués, dans diverses commissions des Conférences Episcopales et des Assemblées Interrituelles des Ordinaires locaux (comme, par exemple dans la Commission pour l'Education, pour la Santé, pour la Justice et la Paix, pour les Communications sociales, etc.) peut se révéler de grande opportunité dans l'action pastorale.

65 - La présence réciproque au moyen de délégués, de la Conférence des Evêques ou des Conférences ou Conseils de Supérieurs Majeurs, aux Unions ou aux Assemblées des uns et des autres est recommandable, des normes préalables ayant été établies pour que chaque Conférence puisse traiter seule les sujets de sa compétence.

Au niveau supranational et universel

66 - En ce qui concerne la sphère internationale, continentale ou subcontinentale, on pourra, avec l'approbation du Saint-Siège établir des formes de coordination pour les Evêques comme pour les Supérieurs Majeurs. A ce niveau, une liaison convenable des divers Centres de Service contribue «heureusement à la réalisation d'une action organisée unanime, de la part des Evêques et des Religieux. Dans les zones où les formes d'organisation dans le milieu continental sont déjà en activité, leurs Comités ou leurs Conseils permanents pourront assurer cette tâche avec profit.

67 - Au niveau universel, le Successeur de Pierre exerce son ministère propre pour toute l'Eglise, mais «dans l'exercice de son pouvoir suprême, plénier et immédiat sur l'Eglise universelle, il se sert des Dicastères de la Curie Romaine» (CD 93) .
Le Souverain Pontife lui-même a favorisé quelques formes de coopération des Religieux avec le Saint-Siège, approuvant le Conseil de l'Union des Supérieurs Généraux et celui de l'Union des Supérieures Générales près de la Sacrée Congrégation pour les Religieux et les Instituts séculiers (cf. ES, II, 42) et introduisant les représentants des Religieux auprès de la Sacrée Congrégation pour l'Evangélisation des Peuples (cf. ES, III, 16).



CONCLUSION

Le dialogue et la collaboration sont déjà en action aux divers niveaux; mais ils devront encore se développer pour porter des fruits plus abondants. Il est donc nécessaire de rappeler que l'oeuvre de collaboration sera d'autant plus efficace que ceux qui en sont les protagonistes seront convaincus que son succès dépend d'abord de leur conviction et de la formation. Tout, en effet, progressera mieux si les intéressés sont profondément convaincus de la nécessité, de la nature et de l'importance d'une telle coopération, dans la confiance réciproque, le respect du rôle de chacun, les consultations mutuelles pour déterminer et organiser les initiatives à tous les niveaux. Alors les rapports mutuels entre les Evêques et les Religieux, conduits avec une volonté sincère et active, exprimeront d'une manière convenable et adaptée la vitalité dynamique de l'Eglise Sacrement dans son admirable mission de Salut.
L'Apôtre Paul, «prisonnier dans le Seigneur», écrivant de Rome aux Ephésiens, les avertissait de la sorte: «Je vous exhorte à mener une vie digne de la vocation à laquelle vous avez été appelés, en toute humilité et douceur, avec patience en vous supportant les uns les autres par amour, vous efforçant de conserver l'unité de l'Esprit par le lien de la paix» (Ep 4,1-3) .



+ Card. SÉBASTIEN BAGGIO

Préfet de la S. Congrégation pour les Evêques


Card. EDUARDO F. PlRONIO

Préfet de la S. Congrégation pour les Religieux et les Instituts Séculiers



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